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REVUE LITTÉRAIRE

CHRONIQUES DE LA GUERRE[1]

L’honneur est le même, dit Salluste, à faire les exploits ou à les raconter. Eh ! non. Salluste essaye de donner le change à son regret Parmi les écrivains qui auront passé les durs mois de la guerre à commenter les événemens, il n’en est pas un qui ne s’incline, et fût-il le plus illustre, devant le plus humble des combattans. Aucun chef-d’œuvre de littérature ne vaut le chef-d’œuvre d’activité qu’une mention de trois lignes à l’ordre du jour de l’armée glorifie, et ne vaut la blessure d’un soldat. Salluste, aussi bien, ce n’est que le travail de la guerre civile qu’il avait quitté ; son ambition seule le tourmentait et il la consolait de son mieux : laissons ce drôle de garçon qui, avec une intelligence admirable, eut l’âme d’un garnement.

Quelques-uns de nos écrivains, à l’arrière, accomplissent très noblement leur devoir modeste et utile en devenant les guides ou les sages compagnons de l’opinion publique, soumise à tant d’épreuves. Plusieurs d’entre eux ont beaucoup d’influence ; et si, au gré de Forain, les civils tiennent, louons l’âme française, forte et vaillante, louons aussi ses mainteneurs, ses camarades persuasifs, ses conseillers de patience et de courage.

Le 5 octobre de l’année dernière, quand on apprit, au matin, la mort du comte de Mun, ce fut, dans toute la France, dans toutes les classes de la société, je ne veux pas dire dans tous les partis, — car il

  1. La guerre de 1914, Derniers articles d’Albert de Mun (Édition de l’Écho de Paris) ; — L’Ame française et la guerre, I. L’Union sacrée, par Maurice Barrès (Émile-Paul, éditeur) ; — Les Commentaires de Polybe, 1er et 2e séries, par Joseph Reinach (Bibliothèque-Charpentier).