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ÉMILE NOLLY
(CAPITAINE DÉTANGER)

Cette année, l’Académie française a décerné le grand prix de littérature à Émile Nolly, pseudonyme adopté par le capitaine Détanger, de l’infanterie coloniale, glorieusement tué à l’ennemi. L’Académie a ainsi consacré une belle œuvre et une belle vie. Voici quelque temps déjà, je saluais le brillant début de cette œuvre, Hiên le Maboul et la Barque annamite, romans remarquables, accueillis avec intérêt, mais non peut-être avec toute la faveur qu’ils méritaient. Le lieutenant Détanger m’écrivit pour me remercier. D’Indo-Chine il était passé au Maroc où il faisait colonne. Je lui répondis. Une correspondance amicale, suivie, commença dès lors entre nous. Nous ne nous connaissions pas, mais nous devinions que des questions parallèles retenaient notre attention et sollicitaient notre ardeur. Dans les lettres qu’il m’adressait, d’étape en étape, de cantonnement en cantonnement, il exhalait ses enthousiasmes, et, parfois, ses impatiences, ses vivacités. Par-dessus tout, je sentais dans ces lignes hâtivement tracées sous la tente la passion de servir la France, d’en faire connaître, d’en faire aimer au loin le souple et tutélaire génie. Un jour viendrait, — ce jour Nolly l’annonçait avec certitude, — où, à l’appel de la mère patrie, de récens enfans accourraient et, serrés autour de notre drapeau, s’opposeraient utilement avec nous à la ruée formidable du Barbare.

Le lieutenant Détanger passa capitaine, revint à Paris. Nous nous vîmes, puis nous nous liâmes tout à fait. J’allais souvent lui rendre visite au ministère des Colonies où il était officier