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confessions, ce qui estoit certainement très faux. J’eus un peu de peine à me laisser persuader, mais enfin je cédai.

J’allai témoigner à ma mère que je me faisois une peine de me confesser au P. du Trévoux, parce qu’il révéloit les confessions. Ma mère me dit que c’estoit un grand désagrément pour ce pauvre homme que toute la famille le quittast, ainsy à la fois, que je me confessasse encore à luy à la feste prochaine qui estoit celle de la Toussaints.

Je ne sais point à présent comment j’avois tourné mon discours, mais je me souviens bien que je m’estois rendu.coupable d’une accusation calomnieuse, et que la honte de le dire à celui que cela regardoit fit que je ne m’en confessai pas.

J’avois commencé à Versailles à enluminer et à dessiner, je ne réussissois ny à l’un ny à l’autre, mais cependant c’estoient mes principaux plaisirs dans mon séjour de Saint-Cloud.

On fit venir Coypel le fils qui venoit, je crois, de faire son premier tableau, mais qui avoit estudié sous son père. Il me donna une teste à dessiner que je copiai plusieurs fois, et cela fit que je commençai à réussir mieux que je ne faisois auparavant.

On me mena à Paris au mois de janvier 1716.

… (lacune) se fit faire une tribune aux Quinze-Vingts au moyen de laquelle j’assistai aux offices de quelques festes. Je feignis des maux que je n’avois point. Un jour, je prétendis estre fort assoupi. On me proposa de jouer au volant avec des enfans que j’avois chez moi et dont je ne manquois pas, Paris et Versailles s’estant réunis. J’aimois beaucoup cet exercice et me piquois d’y réussir. Je jouois donc 5 ou 6 coups de mon mieux, et puis j’allois me mettre sur un siège et je faisois semblant de m’endormir. M. de Court, qui vit que, lorsque je tenois la raquette, je jouois avec ma force et mon adresse ordinaires, soupçonna qu’il y avoit de la manie enfantine. Il descendit chez ma mère, et le résultat de leur conversation fut qu’on renvoya la compagnie de chez moy et qu’on me dit que, puisque j’avois envie de dormir, il falloit me coucher. On me mit dans mon lit, on ferma les rideaux et l’on défendit à personne de m’approcher et de me parler. Je ne fus pas longtemps dans cet estat sans m’ennuyer, et l’ennuy me fit avouer à M. de Court ce que j’avois tant prié ma mère de luy [cacher].

Telle fut la fin de mes fictions de maladies.