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plus, mais la grande-duchesse s’annonce. Nous avons parlé de Mme d’Abrantès, qui se fait craindre en retapant son monde et des Mémoires Parquin, où la Reine mettra ses petits griefs. Elle aurait trouvé au-dessous de sa dignité de les mettre dans ses Mémoires à elle. Je suis bien heureuse d’avoir à m’occuper de cela avec elle. Je m’en distrais ; c’est ma branche de salut. Cela me rend plus nécessaire et fait qu’elle est mieux pour moi. Nous avons aussi parlé des Salm, dont elle fait aussi peu de cas que moi. Je l’ai quittée lorsque le Roi l’a rejointe et que les amoureux sont revenus. Elle m’a aussi parlé de cette affaire des enfans de Lucien. Ils n’ont pas tous les torts, et elle est d’avis qu’on les défende par esprit de famille. Elle engage Jérôme à faire faire aussi sa biographie et lui a fait son plan. J’ai pris au salon un ennuyeux roman de M. Salvandi : Corisandre de Moléon. La Princesse, en emballant sa musique, en avait oublié la moitié et m’emportait mes valses à quatre mains. Elle prétendait que cela ne devait rien me faire, mais elles viennent de la princesse Théodolinde, et j’y tiens à cause d’elle.

Le départ était fixé à ce matin à neuf heures. A huit heures, tout le monde était en bas. La Princesse pleurait à sanglots et le Prince était fort triste aussi. Elle a montré à Elisa une bague charmante en turquoises qu’il venait de lui donner… Les chevaux ne sont arrivés qu’à dix heures. Le prince Napoléon, fort ému et pâle de chagrin, est parti le premier avec M. Bohl. La Princesse éclatait en sanglots. Le Prince la soutenait dans ses bras pour la faire monter dans la voiture de son père, après laquelle il a couru pour lui jeter un gros bouquet. Puis, lorsque Mme de Reding et M. de Stolzing ont été emballés, il est aussi monté à cheval pour les reconduire. Elisa a entendu dire qu’il va partir pour Schinznach, puis pour le camp, elle croit plus tard pour Florence. A déjeuner, la Reine a parlé de tout ce qui s’écrit sur l’Empereur. Elle dit avec raison qu’il n’y a plus qu’elle qui l’ait entendu et qui puisse le faire parler…

Mardi 24 mai.

… Le pauvre Prince ne se sent pas le courage de supporter le vide que va lui faire ce départ. Il a déjà dit à Elisa qu’il part le 1er juin pour Schinznach, puis, après, pour le camp. L’orage est venu. La Reine s’en inquiétait, mais à peine était-il fini que