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personnage religieux, dont l’autorité politique se trouvait être beaucoup plus théorique que pratique. Il gouvernait par des fonctionnaires se payant eux-mêmes et, en réalité, sans contrôle système qui aboutit infailliblement à la corruption et à la paralysie de tout le corps politique. Le mandarinat chinois, est une éclatante confirmation de cette loi historique.

Les mêmes causes engendrant les mêmes effets, Yuen Chekai, maintenant l’ancien système qui seul pouvait lui permettre de conserver le pouvoir, l’administration chinoise devait continuer à croupir dans la corruption et dans l’impuissance. Dans son ignorance de toute méthode rationnelle d’administration, sans personnel au courant des principes occidentaux, les occidentalisés étant pourchassés, Yuen Chekai, pour combattre le mal chronique qui a maintenu la Chine dans une sorte de léthargie pendant si longtemps, emploie le remède dont la monarchie impériale avait déjà éprouvé l’inefficacité : un contrôle par quelques censeurs, inspecteurs envoyés dans les provinces, dont le premier soin est de s’entendre avec les prévaricateurs pour fermer les yeux.

D’autre part, le prestige religieux du chef de l’Etat ayant été balayé par la Révolution égalitaire, les quelques généraux qui dans les provinces peuvent maintenir fidèles autour d’eux leurs soldats, sont en fait des personnages indépendans, sans respect pour le pouvoir et n’agissant qu’au gré de leurs intérêts personnels.

Le résultat d’une telle situation politique ne peut être que ce que nous voyons aujourd’hui : une impuissance de tout fonctionnement d’une administration régulière et une anarchie latente dans les provinces.

Un fait récent marque bien le caractère du régime actuel. Lors de la conclusion de l’emprunt de 1913, une promesse de réforme de la gabelle avait été donnée comme garantie, puisque tout le reste était déjà hypothéqué ; un homme très compétent, sir Richard Dane, Anglais qui avait fait ses preuves aux Indes, fut chargé de diriger cette réorganisation fiscale : or, la presse d’Extrême-Orient nous apportait, en septembre, la nouvelle que ce directeur anglais de la gabelle chinoise offrait sa démission en déclarant qu’il se trouvait dans l’impossibilité de remplir sa tâche en présence du mauvais vouloir des fonctionnaires chinois.

Au surplus, voici le tableau que fait de la situation actuelle le correspondant du Times à Pékin, à la date du 25 août dernier :