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obtint du Sultan une première concession pour études. Plusieurs tracés étaient proposés, partant de divers points sur le Danube, et atteignant l’Adriatique à Saint-Jean-de-Medua ou Durazzo ; les uns traversaient seulement le territoire serbe, d’autres coupaient aussi la Bulgarie. A l’Est de la ligne Salonique-Uskub-Nich-Belgrade, des tronçons existaient déjà, qui auraient été englobés par tel ou tel de ces itinéraires ; l’inconnu commençait à l’Ouest. La prospection, retardée par des rivalités étrangères et des tracasseries administratives à Constantinople, fut enfin organisée par les deux bouts ; du côté serbe, le gouvernement de Belgrade s’y employa très volontiers et des plans précédemment ébauchés furent bientôt mis au point ; mais du côté albanais, la tâche fut beaucoup plus rude. L’Albanie du Nord est un des coins les plus farouches de la péninsule, les habitans y vivent au milieu d’alertes perpétuelles, et circulent toujours armés entre des villages qui sont tous de petites forteresses. Le pays est froid, couvert de neige dès la fin de novembre ; les cols, franchis par des chemins muletiers, ne s’abaissent pas, sur les chaînes principales, au-dessous de 1 200 mètres ; les populations de l’Albanie septentrionale sont défiantes et belliqueuses ; en 1911, bien qu’accompagnés de gendarmes turcs, de paisibles ingénieurs furent reçus à coups de fusil ; les intrigues autrichiennes entretiennent jalousement les rancunes des Mirdites catholiques contre les Albanais musulmans.

On n’en était encore qu’à ces débuts peu encourageans, lorsque les événemens des Balkans se précipitèrent ; il fallut ajourner le Danube-Adriatique à des temps meilleurs. Cependant, dans la Serbie septentrionale et la Bulgarie, les relations transversales avec la Roumanie et la Russie étaient de mieux en mieux assurées. De la ligne bulgare, qui relie les belvédères septentrionaux des terrasses balkaniques, Plevna, Tirnova, Choumla, deux embranchemens s’avançaient vers le Danube, à la rencontre des rails roumains, l’un sur Nicopolis, l’autre sur Routchouk ; cette voie bulgare, qui atteint Varna d’un côté, perce les Balkans de l’autre, dessert Sofia, puis, s’enroulant vers le Sud-Ouest autour des pentes du mont Vitoch, gagne la frontière serbe à Ëgri-Palanka ; prolongée dans cette même direction, elle arriverait à Uskub et pourrait, toutes considérations politiques mises de côté, constituer un très important tronçon du Danube-Adriatique. Le raccord serbo-roumain, par la