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pour que j’observe le silence et cela d’autant mieux que les procédés auxquels je fais allusion pourront servir ailleurs, à l’autre bout du vaste théâtre de la guerre actuelle. Je me bornerai donc à une observation que j’ai déjà eu l’occasion de soumettre à un homme d’Etat, qui me faisait l’honneur de me questionner à ce propos : si cette opération était jugée impraticable par les organismes dirigeans des marines alliées, comment se fait-il non seulement qu’on ait créé, avec, d’ailleurs, une remarquable promptitude, des types de bâtimens tout à fait nouveaux et fort bien appropriés aux circonstances, mais encore qu’on ait exécuté sur les unités de types anciens, cuirassés et grands croiseurs, des travaux longs et coûteux, en vue de leur assurer une invulnérabilité relative à l’égard des armes sous-marines ou, tout au moins, de leur donner ce qui leur manquait essentiellement, la stabilité après avarie des œuvres vives ? On ne dira pas que ces modifications et additions ont été faites pour la navigation et le combat en haute mer, car elles entraînent nécessairement une diminution sensible de la vitesse. D’ailleurs aucun doute ne peut exister sur l’objet final de celles de ces mesures qui ont pour but d’arrêter les mines dérivantes et pour empêcher d’arriver au contact de la carène les mines mouillées à demeure.

Il y a donc eu un moment où l’opération du forcement apparaissait comme praticable et où l’on s’y préparait activement. « Peut-être, m’a-t-on dit encore. Mais, à supposer que celle tentative puisse réussir, reste la difficulté du ravitaillement de la flotte d’opérations dans la mer de Marmara… »

Cette difficulté n’est qu’apparente.

S’il s’agit du combustible, on sait que tous les bâtimens de guerre peuvent prendre du charbon « en surcharge. » La consommation exigée par l’opération elle-même sera faible : il ne s’agit après tout que de 40 milles à faire à la vitesse réduite que permettront les dispositifs spéciaux auxquels je faisais allusion tout à l’heure. La dépense à prévoir pour le séjour dans la mer de Marmara sera peu de chose, puisque les parcours, dans ce lac d’eau salée, sont nécessairement d’une très faible étendue. Il y a d’ailleurs du charbon sur ses rives et à bord des vapeurs qui les desservent. Enfin, les dispositifs essentiels de l’opération de forcement supposent justement l’emploi de navires auxiliaires en nombre assez considérable et qui ne