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toujours eu pour capacité essentielle d’agir, directement ou non, sur les forces terrestres. La guerre actuelle aura montré leur immense utilité à cet égard. Par leur influence ont été possibles le transport des armées anglaises sur le continent, celui de nos coloniaux par-dessus la Méditerranée, l’attaque des Alliés aux Dardanelles, l’expédition allemande en Courlande, etc. Les canons de notre flottille de la mer du Nord ont interdit aux Allemands les dunes de la côte belge auprès de Nieuport. Ne parlons pas des expéditions coloniales, dont la plus importante fut celle du Japon à Kiao-Tchéou. Les flottes de l’avenir auront les moyens de jeter des millions d’hommes sur un rivage éloigné. On aura sans doute constitué le matériel de débarquement qui nous manque encore. Aux Dardanelles, on a fait un premier essai avec un grand vapeur, le River Clyde, dont les aménagemens intérieurs avaient été détruits, de façon à transformer sa coque en une sorte de long tunnel. Lancé à grande vitesse sur la grève du cap Hellès, il vint s’échouer, de sorte que son avant touchât presque le rivage. On ouvrit alors, à ses deux extrémités, de larges portes préparées d’avance. Les chalands, les bâtimens porteurs de troupes l’accostaient comme un appontement. Hommes, voitures et canons le traversaient sans aucune peine et trouvaient ensuite un plan incliné qui les conduisait sur la terre ferme.

Les cuirassés se sont heurtés à des obstacles provenant des batteries de côtes, des mines flottantes et des sous-marins. Les insuccès résultaient, pour la plupart, d’une insuffisante appropriation du bateau à son action contre la terre. La division du travail n’a pas encore été poussée assez loin. On y viendra, par la force des choses. On séparera le bateau de ligne, consacré au combat naval, des batteries flottantes, construites pour agir contre les forts. Ces dernières n’auront pas besoin de grande vitesse. Il leur faudra de faibles tirans d’eau, qui leur permettront de s’approcher du littoral et réduiront les risques dus à la torpille. Un épais cuirassement sera nécessaire, au-dessus de l’eau comme au-dessous. On arrivera probablement au type portant un seul canon, du plus gros calibre qu’un bateau puisse recevoir.

Nous avons vu qu’à terre, on ne peut mouvoir sur les rails actuels des pièces d’un calibre supérieur à 45 centimètres environ. Un affût automobile sur route solide irait plus loin,