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mettaient à profit l’enthousiasme des spectateurs pour recruter des volontaires.

Tous les moyens de réclame, tous les genres de publicité furent mis en œuvre, et l’on sait que les Anglais excellent en la matière. On vit les femmes elles-mêmes, les suffragettes en tête, poursuivre dans les rues les hommes valides et faire honte aux slackers (embusqués) par des apostrophes virulentes : « Pourquoi n’êtes-vous pas engagé ? Rejoignez immédiatement ! « Des films patriotiques se déroulèrent dans tous les cinémas, avec des appels émouvans ou impérieux, multipliés jusqu’à créer un cauchemar d’obsession, une atmosphère de suggestion irrésistible.

Dans toutes les villes du Royaume-Uni s’organisaient des processions avec musiques et bannières, toutes ces manifestations dont le peuple anglais se montre si friand. Tout récemment à Londres, au cours de la journée Kkaki, — le Khaki day, — on vit défiler à travers 50 miles des rues de la Métropole, des colonnes d’hommes en khaki accompagnées de 39 musiques. 6 000 soldats prirent part à ce cortège, la plus grande recruiting demonstration tenue jusque-là. Malgré un temps détestable, les soldats furent accueillis par des ovations enthousiastes ; à certaines haltes fréquentes, des appels vibrans étaient adressés à la foule, soit par des speakers, ou orateurs à la solde du War Office, soit par des membres du Parlement, tandis que, tout le long de la route, les officiers recruteurs s’affairaient dans leur besogne. Chaque nouvelle recrue, après avoir signé son engagement en pleine rue, se joignait au cortège au milieu des applaudissemens. Parmi les speakers qui prirent la parole, on entendit M. Horatio Bollomley, sir William Rull, M. William Thorne, M. Charles Bowerman, etc. Le même jour, de grands meetings de recrutement se tenaient à Ealing, Finchley, Kilburn, Hendon, etc. Dans d’autres villes de province, d’imposantes manifestations s’organisaient. A Hull, un aéro, après avoir lancé sur la ville des feuilles de littérature pour recrutement, atterrit dans un champ où trois grands meetings furent tenus, dont l’un présidé par lord Nunburnholm. Easlbourne voyait défiler dans ses rues un bataillon impressionnant de 1 500 blessés, en uniforme bleu de convalescens, entre les rangs d’une foule qui s’étendait sur trois miles de longueur.

Si nous ne les considérions qu’avec nos yeux français, nous