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la paix de Francfort signée, nous dûmes recourir à des opérations d’une plus vaste envergure pour réparer les désastres, et avant tout libérer le territoire. Un emprunt, destiné à produire 2 milliards de francs effectifs, fut offert au public le 27 juin 1871, en rentes 5 pour 100, au prix de 82 fr. 50 : le succès fut grand. Ce fut un premier rayon de soleil dans le ciel assombri de la patrie que l’empressement significatif avec lequel Français et étrangers apportèrent leur or aux guichets du Trésor public. L’année suivante, une nouvelle quantité du même fonds 5 pour 100 fut mise en souscription au prix de 84 fr. 50 (loi du 15 juillet 1872). On demandait 3 milliards, il en fut souscrit 44. De mémoire d’homme, aucun emprunt n’avait jamais rencontré pareil accueil. Le capital inscrit au Grand Livre, à la suite de ces deux opérations, fut de 6 800 millions de 5 pour 100. En très peu de temps, le cours remonta au pair, qui fut dépassé dès 1874. Le nouveau 5 pour 100 ne cessa de s’élever, si bien qu’en 1881 on le vit franchir le cours de 121. Ce prix démontrait avec la dernière évidence que le taux de notre crédit avait changé, et que la France trouverait tous les capitaux qu’elle voudrait à un prix bien inférieur à celui qu’elle avait dû payer au lendemain des défaites de 1870. Le cours de la rente 3 pour 100, qui s’éleva en 1880 jusqu’à 87, indiquait qu’un taux de moins de 4 pour 100 était dès lors celui qui correspondait à notre puissance financière. La conversion était mûre : elle aurait pu se faire dès cette époque. On crut devoir la différer, pour des raisons de politique et de sentiment ; on voulait ménager les souscripteurs qui, aux jours d’épreuve, avaient apporté leur or au pays.

Ce ne fut qu’en 1883 que le 5 pour 100 fut converti en un fonds 4 1/2, qui était garanti contre tout remboursement pendant dix ans. Le cours s’en établit au-dessus du pair, et sa conversion, à l’échéance, en 3 1/2 pour 100 ne fut qu’un jeu. Dès le 17 janvier 1894, le taux le plus élevé payé par la France à ses créanciers était de 3 1/2 pour 100. Quelques anciennes rentes 4 et 4 1/2 pour 100, qui subsistaient encore et dont l’une remontait à un emprunt de 1829 et l’autre était le résidu de la conversion Villèle de 1825, avaient été, par M. Rouvier, converties en 3 pour 100. C’est en 1887 qu’eut lieu cette opération, qui portait sur un capital d’environ 900 millions et qui amena la disparition de 37 millions de rente 4 1/2 et d’un