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autre. Lorsqu’on s’adressa au gouverneur pour obtenir que les nourrissons fussent confiés à des familles musulmanes charitables, pour les empêcher.de mourir en route, il répondit : « Je ne veux pas que l’odeur même des Arméniens reste ici ; allez dans les déserts de l’Arabie et fondez-y l’Arménie. » — Ainsi, l’extermination, sous couleur de déportation, continue. L’intervention des États-Unis, celle du délégué apostolique, ont été inefficaces. A Constantinople même, des voix honnêtes et courageuses, celle d’Ahmed-Riza entre autres, se sont élevées pour blâmer cette destruction de tout un peuple. A Smyrne, un vali énergique et indépendant, Rahmi bey, s’est contenté d’extorquer, aux Arméniens riches, de grosses sommes d’argent « pour les besoins de l’armée, » et d’arrêter quelques membres des Comités, mais toute déportation en masse et tout massacre ont été épargnés au vilayet d’Aïdin. Enfin, dans la séance du Reichstag du 11 janvier, Liebknecht a posé une question gênante au sujet des Arméniens. M. de Stumm, au nom du chancelier, répondit : « Le chancelier sait que la Porte, devant les menées de nos adversaires, s’est vue forcée d’évacuer la population arménienne de certaines régions de l’Empire ottoman et de lui fixer de nouveaux lieux de résidence. Certains effets de ces mesures ont donné lieu, entre le gouvernement allemand et le gouvernement ottoman, à un échange de vues. Des détails plus précis ne peuvent être donnés. » Au moment où le professeur Kampfmeyer, qui enseigne les langues orientales à l’Université de Berlin, célèbre, dans le Berliner Tageblatt, l’avenir triomphal des « germano-turcs, » le gouvernement impérial parait quelque peu gêné de cette association, qui remplit d’aise le professeur, avec les massacreurs de la Jeune-Turquie.

Un journal arménien de Boston, l’Azk, publiait dernièrement ces lignes : « Les pasteurs et théologiens protestans d’Allemagne ont fait une démarche auprès du chancelier Bethmann-Hollweg pour demander son avis sur la situation en Arménie ; la réponse fut : « Le gouvernement impérial considère toujours comme un de ses plus hauts devoirs d’user de son influence en faveur de tous les chrétiens. Les chrétiens allemands peuvent être assurés que toutes les mesures possibles sont sur le point d’être prises à cet effet. » À cette occasion, la Nord-deutsche Allgemeine Zeitung écrit : « Tandis que les États