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bouddhisme, le confucianisme s’adaptent, s’amalgament selon les besoins, les exigences, les goûts des classes ou des individus. De même les arts se prêtent, selon la nuance et le degré, à ces divers goûts ou besoins. Okakura nous représente les kuge de Kyoto gardant encore l’étiquette du Xe siècle, les costumes du xie, prononçant le chinois avec l’accent des ïang, dansant au rythme de l’ancienne musique, fidèles aux anciens poètes, aux anciens peintres. Il nous montre les daïmios et les samurai attachés à leur ancien idéal, à l’école des peintres du XVe siècle, aux drames et danses de No, à la religion Zen, aux manières et à l’art des Ashikaga.

Iyeyasu et les premiers Tokugawa sont des Mécènes. Ils ont leurs peintres, Tanyu, le grand artiste de la troisième génération de l’école Kano, ses frères Naonobu et Yasunobu, et son neveu Tsunemobu. Ils commencent à régler l’art comme le reste, à fonder dans les diverses parties du Japon des écoles ou académies Kano, dont les principes ont été posés par Tanyu. A côté de l’école Kano, ils rétablissent, avec ses privilèges et honneurs héréditaires, l’ancienne école Tosa, de la période de Kamakura, dont Mitsuoki et Sumiyoshi sont les nouveaux maîtres. En dehors de ces écoles officielles, apparaissent, au milieu et à la fin du XVIIe siècle, trois maîtres indépendans : Honnami Koyetsu, Sotatsu, Korin, qui sont de grands décorateurs autant que de grands peintres, et qui créent un style. A la même date commence l’école dite populaire, l’Ukioye, qui, créée par Yuvvasa Katsushige, se développe vers la fin du XVIIe siècle, dans la période connue sous le nom de Genroku, puis, aux XVIIIe et XIXe siècles, à Tokyo surtout, avec les maîtres Matahei, Moronobu, Harunobu, Koriusai, Kyonaga, Outamaro, Hokusai, Hiroshige. Une autre école, également populaire, naît et se développe à Kyoto, avec les maîtres Maruyama Okio, Goshun et Ganku. C’est l’école populaire de Yeddo ou Tokyo, l’Ukioye, qui a la première révélé à l’Europe l’art japonais et qui, à son tour, n’a pas laissé que d’exercer son influence sur l’art européen, en peinture et en gravure. Pendant quelque temps les estampes de l’Ukioye, qui n’étaient que la dernière et non la plus haute création de l’art japonais, ont paru être pour l’Europe l’art japonais lui-même. C’est, du reste, avec la période des Ashikaga, l’école qui nous est le plus accessible et qui offre avec certaines des nôtres le plus