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inventions ou institutions de l’Occident avec un puissant mouvement de retour à l’esprit et a l’idéal national, au vieux Japon. Au moment même où il allait entrer dans sa nouvelle carrière, le Japon se retrempait à sa source même, à ses origines : là a été le secret de sa force, de sa continuité, de cette haute et merveilleuse fortune qui a fait d’une des plus anciennes races de l’Asie l’une des grandes Puissances du XXe siècle.


V

« La Restauration, écrit Okakura, a été en même temps une réforme. En sortant de notre solitude asiatique pour prendre notre place sur la grande scène du monde, nous étions obligés, d’une part, de nous assimiler beaucoup des institutions que l’Europe nous offrait pour notre progrès, et, d’autre part, de ressusciter en même temps les « idéaux » classiques de l’Orient. L’idée de la réforme a été clairement exprimée par la Déclaration impériale de 1868, dans laquelle Sa Majesté, en montant sur le trône, disait que les obligations nationales devaient être considérées du large point de vue de l’humanité universelle. D’après le sens même du mot, notre Restauration était essentiellement un retour.’ Le gouvernement reprit la forme d’une bureaucratie impériale, telle qu’elle avait existé avant l’avènement du régime féodal, sept siècles plus tôt. Le premier acte du nouveau gouvernement fut de rétablir tous Tes anciens bureaux et offices, avec leurs noms primitifs, tandis que des fonctions et des cérémonies depuis longtemps oubliées étaient remises en vigueur, et que le shintoïsme était proclamé religion de la Maison impériale. Des honneurs posthumes étaient conférés aux loyalistes, tels que Masashige, qui avaient servi la cause de la Cour impériale sous les anciens shogunats, et nombre de leurs descendans furent anoblis. Mais cette renaissance du passé se tempérait du nouvel esprit de liberté et d’égalité. Le Mikado, en même temps qu’il proclamait le shintoïsme religion de la Maison impériale, accordait la liberté de conscience à toute la nation, et le christianisme était affranchi de l’interdiction qui le frappait depuis l’expulsion des Jésuites au XVIIe siècle[1]… »

  1. Le Réveil du Japon, p. 162-164.