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Les quartiers n’ont pas apprécié de la même façon le caractère d’utilité qui confère la dispense. Certains administrateurs se sont montrés sévères, d’autres indulgens. Dans un quartier, les petits pêcheurs, qui sortent un jour sur trois, n’ont pas été inquiétés parce qu’ils sont actifs au sens de la loi ; dans un autre, l’administrateur, prenant à la lettre l’injonction ministérielle, s’est fondé sur la production des pêcheurs et a levé sans pitié tous ceux qui n’apportaient pas sur les marchés une quantité de poisson suffisante pour que l’on pût affirmer que leur industrie était « utile au pays. »

D’ailleurs, alors que tous les Français sont aux armées, sans distinction pour le métier qu’ils remplissent dans la vie civile, il devient illogique d’assurer aux pêcheurs un privilège qui ne se justifie plus. Leur maintien sur les navires leur a permis de mener jusqu’au bout les campagnes de pêche au hareng, à la sardine, au thon, etc. Avec l’approche de la mauvaise saison, leur travail n’est plus fructueux ; la population maintenue dans ses foyers est largement suffisante pour assurer l’exercice de la petite pêche et de la pêche côtière. On se gardera bien, toutefois, d’inquiéter les chalutiers à vapeur dont l’utilisation est prévue éventuellement comme arraisonneurs, remorqueurs auxiliaires, dragueurs ou comme patrouilleurs dans la chasse contre les sous-marins.

C’est une dépêche du 22 décembre 1914 qui fixe définitivement la situation des inscrits par rapport à leur dette militaire. Ses dispositions se résument ainsi : tous les inscrits de dix-huit à quarante-sept ans sont, en principe, rappelés au service, à l’exception de ceux qui naviguent effectivement sur des navires dont l’armement a été jugé indispensable aux intérêts généraux du pays à la suite d’une enquête contradictoire effectuée dans chaque quartier par le contrôle et les administrateurs de l’Inscription maritime. Exception est faite également pour les pêcheurs de plus de quarante-cinq ans pratiquant effectivement leur industrie. Les navires qui confèrent le sursis sont ceux qui sont armés au long cours, au cabotage et au bornage, lorsque ces derniers sont jugés nécessaires aux relations entre les îles et le littoral où à l’exploitation des ports de commerce : pilotes, remorqueurs, etc. Il est dressé une liste de ces navires aussi restrictive que possible. Les autorités examinent ensuite individuellement le cas de tous les inscrits maintenus dans leurs