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reconnaître leur évidente opportunité aussi bien que l'excellence des intentions de leurs auteurs.

C'est la proposition de M. d'Estournelles de Constant, en vue de la création de conseils de tutelle où devaient se rencontrer le juge de paix, le maire, les directeurs d'écoles primaires et les délégués des œuvres de patronage.

C'est la proposition de M. Ferdinand-Dreyfus, instituant des délégués à la tutelle, intermédiaires légaux entre la famille et la justice. Le contrôle individuel des délégués préconisé par M. Ferdinand-Dreyfus n'a guère trouvé plus de faveur que la surveillance collective imaginée par M. d'Estournelles de Constant.

Or il est dangereux aujourd'hui d'ajourner le problème et d'atermoyer davantage. L'imperfection du régime civil des tutelles est regrettable sans doute, même si les victimes de cette lacune juridique sont peu nombreuses. Elle n'est plus supportable lorsque le nombre des tutelles est lamentablement multiplié et que l'institution devient applicable à des milliers et des milliers d'orphelins.

Que dirons-nous d'autre part du régime de la tutelle nationale organisée pour les pupilles de l'Assistance publique ? Pour ceux des orphelins de la guerre qui vont demeurer sans famille, n'offre-t-il pas au moins toute garantie ? En quoi pèche-t-il donc ? Je me hâte d'affirmer qu'il ne pèche en rien, et que les enfans élevés par les administrations départementales sous le contrôle légal des Préfets et sous la surveillance effective d'inspecteurs spéciaux, reçoivent les soins les plus attentifs et l'éducation la mieux appropriée à leur condition.

Mais, — il y a un terrible « mais, » — leur condition est celle d'enfans trouvés, d'enfans moralement ou matériellement abandonnés, d'enfans nés de parens de hasard, inconnus ou malhonnêtes. Certes, les pauvres petits n'en sont que plus dignes de pitié, et il ne se trouverait personne en notre temps pour leur faire grief de leur naissance ! Cependant ne se sent-on pas choqué par la pensée de confondre avec eux, pour les faire profiter des mêmes soins paternels, les enfans de nos braves paysans tombés au champ d'honneur pour la défense de nos foyers ? Les fils des glorieuses victimes de la guerre n'ont-ils pas droit à un traitement de faveur, à un privilège de noblesse,