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LE PROBLÈME FRANCO-ALLEMAND DU FER

Dans un article précédent, j’ai essayé de montrer combien le problème de la houille est une question capitale, économiquement et militairement, pour la France. Il faut, à la France, sous peine de s’étioler et de s’éteindre, des champs houillers nouveaux : il faut l’annexion (ou plutôt la reprise) du bassin de la Sarre, qui doit être notre delenda Carthago, puis une mainmise commerciale sur une partie des charbonnages westphaliens. Je voudrais faire voir aujourd’hui comment se pose, entre les deux nations, un autre problème minier qui, dans une certaine mesure, est connexe du précédent et au sujet duquel il peut être bon également que le public français commence à se former une opinion raisonnée pour savoir, à l’heure des négociations définitives, ce qu’il doit exiger, quelles seront les conséquences futures de ses exigences, et aussi quelles résolutions extrêmes celles-ci pourraient entraîner chez l’adversaire. Avant même que cette heure ait sonné, la question du fer lorrain se pose déjà sous une autre forme, mais ici je n’apprendrai rien sans doute à ceux qui nous conduisent vers la victoire. Pour abattre définitivement l’Allemagne, il n’est pas nécessaire de pénétrer très loin sur son territoire, pas même d’atteindre Essen et Dortmund : il suffirait presque d’entrer à Thionville. Une douzaine de kilomètres au-delà de notre frontière de 1871 nous livreraient ses mines de fer lorraines. A partir de ce jour-là, l’Allemagne pourrait se débattre encore ; n’ayant plus de quoi alimenter ses hauts fourneaux, ses aciéries, ne pouvant plus subvenir à l’insatiable appétit de ses usines Krupp, malgré ce qu’elle tirerait encore du pays de Siegen ou de la Suède, elle serait blessée à mort. Je semblerai