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des minerais d’importation, dits « minerais à acier, » tels que ceux de Bilbao ou de Mokta-el-Hadid. La Lorraine, dont les gisemens étaient, on l’a vu, connus depuis l’époque préhistorique, ne jouait encore qu’un rôle très secondaire dans cette période, comme producteur d’une fonte impure utilisée au moulage. En 1859, les départemens de la Meurthe et de la Moselle, qui comprenaient la totalité du Bassin Lorrain, ne fournissaient que le dixième de la fonte française : 84 000 tonnes sur 864 000. En 1867, on n’atteignait que 321 000. En 1875, la production, réduite par l’occupation allemande qui nous avait pris ce que l’on connaissait alors de meilleur, ne chiffrait que 201) 000 tonnes : pas même le dixième de ce qu’elle a donné en 1913 (3 493 000 t.).

Enfin, la phase actuelle a commencé en 1878 quand Thomas Gilchrist, un petit clerc de solicitor londonien qui s’amusait à suivre des cours de métallurgie, eut trouvé le moyen de traiter les minerais phosphoreux, si abondans sur notre sol, dans le gisement normand comme dans le gisement lorrain, et son développement a été surtout marqué le jour où le procédé Thomas est tombé dans le domaine public. Grâce à cette découverte, nos minerais cessaient, en effet, d’être dépréciés par leur phosphore et leur valeur accrue permettait d’aller les chercher à des profondeurs dont il n’avait jamais été question auparavant. Dans la période antérieure, on ne s’était occupé en Lorraine que des affleuremens situés aux deux extrémités du bassin : soit au Nord vers le Luxembourg et Longwy (Saulnes, Godbrange, Hussigny, Micheville, Villerupt, etc.) ; soit au Sud, vers Nancy. De 1882 à 1896, on entreprit, au contraire, une grande campagne de sondages sur les gisemens profonds situés dans la zone intermédiaire de Briey, et les résultats en furent tels que ce groupe nouveau de Briey a déjà pris et va prendre plus encore une prépondérance absolue. Par suite des résultats obtenus, il se produisit alors, dans toute cette région, une transformation qui métamorphosa un pays agricole en un centre industriel, qui amena la création à Briey de 45 concessions (113 au total pour la Lorraine) avec toutes leurs installations d’extraction et de triage, la multiplication des hauts fourneaux, le groupement de 17 300 mineurs (13 300 à Briey), dont 12 000 étrangers, italiens, belges, etc. Il s’en est suivi, sinon la ruine de nos industries du Centre, du moins la nécessité pour elles de prendre une