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début de la guerre, l’Université de Londres, en quatre ans et demi, avait fourni à l’armée anglaise 189 officiers seulement : elle lui en a, depuis l’ouverture des hostilités, donné plus de 2 000. Dans la même période, d’août 1914 à février 1916, Cambridge fournissait à l’armée plus de 3 000 officiers, dont plus de la moitié (1 790) sert dans l’armée régulière. Mais que dire de la foule de ceux qui s’enrôlèrent comme soldats ? Il faut parcourir ces « listes de guerre » (War lists), ces « rôles d’honneur » (rolls of honour), où les universités ont enregistré les noms de leurs membres, anciens ou actuels, gradués, alumni ou sous-gradués, qui servent actuellement sous les drapeaux du Roi. Vous y trouverez pour Londres plus de 6 000 noms, dont 900 appartiennent au seul University College ; vous y trouverez pour Edimbourg, à la date de juillet 1915, plus de 3 500 noms, et ils sont 4 500 aujourd’hui ; dans un seul collège d’Oxford, à New Collège, plus de 900 élèves, anciens ou actuels, sont au service ; et, à la date du 20 mai 1916, la War list de Cambridge comprenait 11 834 noms.

De cette part prise par les leurs à la grande guerre les universités anglaises sont justement fières, et davantage encore de la façon glorieuse dont ils ont payé leur dette au pays. Les universités enregistrent soigneusement les distinctions, les citations, — et elles sont nombreuses, — dont leurs étudians ont été l’objet ; et dans la chapelle de chacun de leurs collèges, pieusement la liste est placée de ceux qui sont morts pour la patrie. Ces pertes ont été lourdes souvent. Sur le contingent d’officiers fourni par l’Université de Londres, 92 avaient été tués à la fin de mai 1916 ; à Oxford, dans un seul collège, sur 900 étudians qui servent, 90 ont été tués ; et, pour l’Université de Cambridge, on comptait au 20 mai 1916 plus de 2 000 tués, blessés et disparus.

Dans ce nombre, il faut compter bien des professeurs, bien des fellows (dans la seule Université de Londres, on en trouve plus de 600), qui n’ont point hésité à prendre du service dans l’armée ou dans la marine et dont plus d’un est tombé sur les champs de bataille. C’était le cas de ce fellow d’Oxford, dont j’occupais passagèrement l’appartement à Magdalen. Très épris, à en juger par les livres de sa bibliothèque, de l’étude des sciences religieuses, particulièrement curieux des choses et des religions de l’Inde, il avait sans regret quitté sa calme et