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une grande importance après la guerre : un comité d’initiative, composé de 14 patrons, fut nommé par 460 maisons travaillant les métaux, le bois et le cuir ; il expédia aussitôt, dans toutes les directions, 15 missions d’ingénieurs, qui visitèrent et inventorièrent les usines des différens groupes. Le comité ainsi constitué examine et transmet les offres, propose les commandes à tels ou tels spécialistes capables de les exécuter, rédige et passe les contrats entre le gouvernement et ces confrères de toutes classes et s’assure que les livraisons, auxquelles il préside, sont correctes.

N’y a-t-il pas là l’embryon d’un cartel capable de conclure en temps de paix avec l’étranger ? Ce n’est encore, il est vrai, qu’un embryon ; les nouvelles usines que la guerre a fait surgir, en Russie, — au nombre de 400 depuis août 1914, — ou chez certains neutres pour se substituer aux Allemands sont, elles aussi, dans l’enfance. Même avec une haute barrière de douanes la Russie ne peut pas se passer d’un grand nombre d’articles importés ; elle ne saurait improviser leur fabrication intérieure. Mais elle peut procéder graduellement et viser à vendre ses produits ruraux, non plus à l’état naturel, mais travaillés et ayant par suite plus de valeur : farine au lieu de grain, poutres et planches dégrossies au lieu de bois en grume, peaux préparées au lieu de pelleteries brutes, bétail et viande au lieu de fourrages, etc.

La conférence des huit États alliés s’est trouvée unanime pour décider que, la guerre ayant mis fin à tous les traités de commerce qui les liaient aux puissances ennemies, il était essentiel que leur liberté demeurât pleine et entière vis-à-vis des tiers, pendant une période de reconstitution économique dont la durée sera par eux déterminée d’un commun accord. Il n’y aura plus, suivant l’ancienne formule, de « nation la plus favorisée » en général, mais une série de spécifications, de cas particuliers à tel pays ou à telle marchandise à qui l’on réservera les concessions.

Ce régime d’exceptions et de privilèges réciproquement accordés, s’accommode fort bien des hauts tarifs, qui seront la règle générale, même en Angleterre : qu’aurait pu donner naguère le libre-échange anglais, comme compensation, à la Russie ou à l’Italie ? Cette question des « débouchés compensateurs, » dont la conférence a posé le principe, est la contre-