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bon marché réel, issu de la fabrication en grand, de la spécialisation intelligente.

La contre-partie des prohibitions qui engendreraient la paresse et l’égoïsme, sera l’intervention de l’État, agissant non pas directement comme industriel, mais comme excitateur et régulateur, comme associé aussi. Il existe à Paris des Compagnies fermières du Gaz, des Eaux, du Métropolitain, dont la gestion progressive et prudente peut servir de modèle lorsqu’il sera question pour l’Etat d’utiliser l’outillage industriel que la guerre lui a mis en mains.

La crise du fret et des transports se prolongera après la guerre ; les Empires centraux ont annoncé leur intention d’aménager un réseau de navigation intérieure, par la communication du Danube régularisé avec le Rhin, l’Elbe et l’Oder, qui permettrait des échanges à bas prix de la Baltique et de la mer du Nord avec la Mer-Noire et le golfe Persique. Avant que ces plans grandioses aient trouvé l’argent nécessaire à leur réalisation, les Alliés, qui disposent d’un littoral étendu et de ports excellens, peuvent créer un cabotage commun et rétablir, comme il est déjà proposé au Parlement français, la surtaxe de pavillon pour les navires étrangers, admis en nos ports depuis 1866 sur le même pied que les nôtres. Les transports terrestres seront également l’objet de remaniemens en vue de favoriser le transit dans telle ou telle direction. Chacun des Alliés a beaucoup à faire sur ce terrain, puisqu’en Russie un colis postal de cinq à douze livres, expédié d’une ville à l’autre à l’intérieur de l’Empire, payait 4 fr. 80, et le même, expédié d’Allemagne en Russie ne payait que 2 fr. 50.

Il a été résolu qu’un « Office de transports » établirait des titres uniques (lettres de voiture ou connaissemens) permettant aux Alliés entre eux de s’envoyer directement des marchandises, quels que soient les transbordemens successifs, par fer et par eau, comme d’une gare française à une gare anglaise ou russe, avec des tarifs soudés et combinés. L’Allemagne avait un intérêt majeur à ne pas abandonner les vieux usages à cet égard ; elle arrivait ainsi à dénationaliser au passage, au profit de ses commissionnaires, les marchandises qui traversaient son territoire.

Ainsi les Alliés ont, dès ce jour, arrêté en commun les grandes lignes de leur politique commerciale, pour la période