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L'ART « GOTHIQUE »
ŒUVRE DE FRANCE

Le pangermanisme n’est pas seulement une doctrine et une entreprise d’accaparement pour le présent et l’avenir ; il ne lui suffit pas de soutenir que l’humanité doit être désormais — et pour son plus grand bien, cela va de soi ! — « organisée » et dirigée, pour ne pas dire plus simplement domestiquée et exploitée, par l’unique Kultur ; il prétend encore démontrer que le passé lui appartient, que tout ce qui s’y est fait de grand et de beau contenait en germe quelque élément « purement germanique, » indispensable levain de l’inerte matière humaine… C’est la thèse que reprenait, le 15 mars 1915, devant ses « dignes concitoyens et concitoyennes ». de Gottingen, le docteur H. A. Schmid, professeur réputé de l’illustre université, car tandis que, sur le front, les chefs bombardent et incendient, que les gaz lacrymogènes et asphyxians, les pompes à pétrole enflammé font scientifiquement, sournoisement, leur ignoble besogne, à l’arrière les théologiens, les érudits et les esthéticiens prêchent, dissertent et enseignent. Toutes les forces du Deutschtum sont méthodiquement déchaînées ; les soldats sont partis pour asservir le monde, les professeurs travaillent à l’annexion rétrospective de toute la civilisation. Leurs paroles aussitôt recueillies, multipliées par l’imprimerie, répandues par centaines de mille brochures à couverture rouge et noir : Deutsche Reden in schwerer Zeit (Paroles allemandes pour les temps difficiles) vont porter jusqu’aux extrémités du pays et chez les neutres la bonne parole et la « vérité, » telles qu’elles doivent être connues… Les arsenaux de la propagande