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sujets coloniaux d’Afrique et d’Extrême-Orient des soldats aussi dévoués que braves, et qu’ainsi nous voyons, à côté des hommes libres, ceux qui passaient pour être d’une race inférieure se sacrifier afin de délivrer l’Europe et le monde de la tyrannie germanique.


Il serait difficile et d’ailleurs indiscret de chercher à évaluer les effectifs anglais, comme conclusion à cette étude. Lord Derby estimait que l’Angleterre pouvait fournir 5 millions d’hommes valides. Le dernier budget de la guerre réduit ce chiffre à 4 millions. Il faut tenir compte en effet du recrutement de la flotte et du personnel absolument indispensable à l’usine de guerre. Ces millions d’hommes ne sont pas d’ailleurs immédiatement prêts à venir sur le front de bataille. Il faut les instruire et les encadrer, il faut former des officiers et des sous-officiers, et cela n’a pas été la tâche la moins délicate dans un pays qui n’avait en somme qu’une armée de métier et un corps d’officiers recruté à peu près exclusivement dans la classe riche.

Mais d’énormes disponibilités comptent ainsi dans la grande réserve stratégique des Alliés, et c’est l’essentiel. Nous savons aujourd’hui que l’armée anglaise sera constamment renforcée, et qu’à la longue, à côté de nos armées réduites, mais dont la valeur reste incomparable, elle sera de moitié dans l’offensive suprême. Nous savons aussi que cette armée accroît en même temps que ses effectifs son expérience guerrière et sa supériorité matérielle : les Allemands l’ont éprouvé dans les rudes combats qui se livrent sur la Somme. Un de leurs critiques militaires, auquel la presse alliée fait trop souvent l’honneur de citer quelques-unes de ses lourdes appréciations, annonçait récemment que la prochaine bataille verrait la fin de l’armée continentale anglaise ! Nous ne prétendons pas que les batailles qui suivront verront la fin de la puissante armée allemande, mais nous serons de l’avis d’un autre écrivain allemand, le colonel Gaedke, qui ne manque pas d’impartialité, probablement parce qu’il écrit dans le Vorwaerts, et nous dirons avec lui : l’armée anglaise ne fait que commencer.


Général MALLETERRE.