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falsification. Une étude du catholicisme allemand sous l’empereur Guillaume II ne pouvait se présenter comme un prolongement de l’histoire de l’ancien Centre, mais plutôt comme la constatation d’une cassure. Nous laissions la cassure se dessiner pleine-mont, avant d’aborder cette page d’histoire toute neuve, et peut-être imprévue pour beaucoup, qui exigeait que certaines façades fussent transpercées, qu’un certain trompe-l’œil fut détruit.

La guerre, soudainement, a mis en lumière, — en une lumière crue, — tout ce que ces façades cachaient, tout ce que ce trompe-l’œil dissimulait. Ne cherchez plus le Centre de Windthorst ; il est devenu le parti de M. Erzberger. Les déconcertantes évolutions qui l’ont fait ainsi dévaler sont désormais assez nettement accusées pour que nous puissions dire aux nouveaux conducteurs de l’action catholique allemande : « Si nous ne parlons plus de vous comme nous parlions de Windthorst et de ses amis, c’est parce que ce qu’ils étaient, vous avez cessé de l’être, et ce qu’ils voulaient, vous avez cessé de le vouloir ; vous vous servez de leurs noms respectés comme d’un paravent ; mais nous avons le droit, nous, de vous mettre en contradiction avec eux, et de montrer qu’il n’y a rien de commun entre leur historique vaillance, que nous continuons d’admirer, et vos demi-abdications, vos coquets manèges, votre savante souplesse à l’endroit de l’Empire évangélique. »


I

Windthorst acceptait comme un fait l’unification germanique telle que l’avait concertée la Prusse ; mais il en déplorait les méthodes ; il gardait à cette dynastie de Hanovre, qu’avait détrônée Bismarck, une intime fidélité ; et ses efforts patiens, ses tenaces interventions, visaient à sauvegarder, bon gré mal gré, dans un empire qui se caporalisait, certaines survivances légitimes des anciennes autonomies, c’est un Guelfe, disait de lui Bismarck ; c’est un particulariste, reprenaient en chœur les organes bismarckiens. Guelfe, particulariste, ce n’étaient pas là des injures, aux yeux de Windthorst : il lui plaisait au contraire que Souabes et Bavarois, Hanovriens et Rhénans, fussent ainsi invités à se tourner vers lui comme vers le défenseur éventuel de leurs traditions entamées, de leurs libertés compromises, de leurs consciences menacées.