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extermination mutuelle ne soit pas achetée par de grands malheurs publics. Quoi qu’il en soit, on compte parmi eux trois opinions tranchées : les partisans de la Commune, qui exagèrent les franchises municipales ; ceux-là ne sont que des imprudens ; les socialistes, dont la doctrine va droit à bouleverser la société en attaquant les seuls principes qui la soutiennent ; enfin, une véritable horde de misérables qui n’ont des anciens Jacobins que la paresse et les vices. C’est à eux que la société devra son salut par l’imminence du péril qu’ils lui feront courir. Déjà, ils sont les plus forts ; la terreur qu’ils inspirent au Comité central commence à se faire sentir ; on les reconnaît à ces visages sinistres dont l’aspect ne frappe les regards qu’à certaines époques de trouble profond et de commotion violente. Un peu de patience encore, et la population ne les confondra plus avec personne ; l’action des lois pourra s’exercer sur eux sans que personne se sente menacé. Voilà, autant que j’en puis juger, l’état réel de Paris, état grave, qui semble appeler la guerre civile et rendre une collision armée inévitable. Mais à côté du mal, on commence à voir et à pressentir le remède ; entre les égarés et les méchans, la distance s’élargit. Vienne l’engagement matériel, et ceux qu’on croit si forts seront livrés par leurs excès mêmes.

« Hier, une démonstration violente a eu lieu dans mon quartier, sous mes fenêtres. De midi à trois heures, les clairons, les tambours appelaient aux armes la garde du Comité ; il faut bien le reconnaître, leur nombre était encore considérable, mais il ne s’agissait pas d’une bataille. Par un beau soleil, tout honteux, j’imagine, d’éclairer ces turpitudes, une trentaine, une quarantaine de bataillons se rassemblaient pour célébrer, autour du Panthéon, le triomphe de la Commune. Le drapeau rouge flottait déjà sur trois pavillons de l’Hôtel de Ville, aux Tuileries, au Palais de Justice, au Tribunal de Commerce, à tous les ministères ; Notre-Dame n’avait pas même été épargnée. On a voulu l’arborer sur le dôme du Panthéon ; à trois heures et demie, la croix a été sciée, une salve d’artillerie a annoncé la grande joie, l’heureuse nouvelle, et les bataillons ont défilé autour du monument. Beaucoup de fracas et de politique déclamatoire ; au fond, un gros désordre, une pensée de sang, l’excitation à la guerre civile. » (1er avril.)

Le 4 avril, une troupe de fédérés envahit le lycée. Un