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qui est nécessaire s’accomplisse ! Que la résurrection de la Patrie s’accomplisse ! Nous devons le vouloir ! Nous le voulons ! Vive l’Italie plus grande ! Vive la juste guerre !


Et Gênes, tout entière debout cette nuit-là, Gênes conquise, poussa le cri bref de la volonté latine : « Fiat ! Fiat ! »


Rome devait répondre à Gênes d’un cri pareil et si haut que son écho déferla jusqu’à ce rocher de Quarto d’où Garibaldi veillait sur les destins de la Patrie. Ainsi, à l’heure décisive, unanimement, l’Italie avait choisi pour vivant drapeau son poète, l’un des plus grands du monde, celui qui représente l’incarnation de sa race. La nuit du 17 mai, chaude d’héroïques souvenirs, assemblé au Campidoglio, muet sous les étoiles aux pieds de son jeune Roi élu pour la gloire, le peuple de Rome palpita aux accens pathétiques de la « Voix » qu’il s’était donnée.

Avec son magnifique don verbal, avec sa puissance innée d’exalter la multitude, le grand citoyen Gabriele d’Annunzio par là au cœur de son peuple. Pendant des momens splendides, il réincarna à ses yeux l’âme des aïeux. Superbement, il fit resplendir pour lui l’idéal irrédentiste, le rappela à sa vraie tradition de colère contre l’ennemi « descendu du pays pluvieux et surgissant de l’Alpe pour se ruer dans les plaines ensoleillées de la Lombardie ; » habilement, il suscita le courroux de la foule, et alluma sans merci son cœur innombrable, avec des paroles pour brandons :


… La Patrie est perdue, si aujourd’hui nous ne combattons pas pour elle avec toutes nos armes ! Il faut gagner la suprême bataille contre l’ennemi intérieur, avant de s’élancer d’un élan unanime vers la sainte « Revanche. »


Avec le geste, le timbre, le rythme qui électrisent, l’Animateur rappela sans crainte, au Roi, la parole impérieuse de Cavour : « L’heure suprême pour la monarchie savoyarde a sonné. » Au peuple, il répéta, sans peur, la rude menace du Libérateur de Marsala : « Celui qui, aujourd’hui, ne s’arme pas, est un lâche ou un traître. »

Enfin, embouchant la trompette retentissante, Gabriele d’Annunzio jette le dernier appel héroïque, celui qui devait retentir des deux côtés des Apennins et soulever tous ceux qui étaient capables de sentir que, pour la justice souhaitée, il y