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exactement. D’une manière générale, les conditions de l’engagement ne paraissent pas avoir été favorables à l’action des submersibles. Il ne faut pas se représenter la lutte si complexe du 31 mai comme une bataille rangée, type de combat où les théoriciens jugeaient à peu près certaine l’intervention efficace des « sous-marins d’escadre, » lançant à point nommé leurs torpilles dans le tas. J’imagine que les élémens qu’engageaient successivement les Anglais ne se présentaient pas en ordre rigide. Ajoutons qu’ils devaient marcher à la vitesse maxima. Enfin, des témoins oculaires affirment que la surface de la mer était fouettée par une telle trombe de projectiles qu’aucun périscope n’eût pu s’y risquer. Il y a un peu d’exagération dans ces dires. On soupçonne aisément que, de trois heures et demie de l’après-midi à dix heures du soir, il a dû se produire quelques accalmies dans la canonnade…

Attendons, encore une fois.

Un capitaine de petit navire marchand rapporte qu’il vit, en pleine nuit, des torpilleurs et des sous-marins anglais qui se dirigeaient du côté d’Helgoland. Si le fait est exact, c’était évidemment dans l’intention de torpiller les grandes unités qui venaient de mouiller derrière le « Sand Insel. » Et l’intention était excellente : voilà un judicieux emploi du sous-marin. Mais le fait est-il exact ? Et, s’il est exact, quel a été le résultat de cette attaque ? Nous l’ignorons pour le moment.


Tout ceci nous conduirait à la question des pertes subies par les deux flottes, si je pouvais, à cet égard, fournir aux lecteurs de la Revue d’autres et de plus exactes indications que celles qui ont été données à profusion par les journaux quotidiens. Ne parlons pas des pertes anglaises, qui sont bien connues, et qui ont été immédiatement déclarées avec une belle franchise, avec, même, une sorte d’abandon. On sait aussi que le gouvernement allemand s’est fort piteusement décidé, quelques jours après son triomphant « radio, » à reconnaître qu’il fallait ajouter la destruction du Lutzow et du Rostock, — croiseur de combat dreadnought et croiseur léger du type dit « des villes d’Allemagne, » — à celles du Pommern[1], du Wiesbaden et du Frauenlob.

  1. Il s’agit très probablement d’un dreadnought neuf, qui a pris le nom du cuirassé assez ancien coulé par un sous-marin anglais dans le golfe de Dantzig, le 1er juillet 1915. À moins cependant que celui-ci ait pu être remplacé.