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à renseigner les neutres sur les choses de Pologne... vues de Berlin et de Vienne. Un quotidien occasionnel de langue allemande, le Limburger Tageblatt, s’intitule « l’organe central du Limbourg Hollandais et du Limbourg Belge. » Par une distraction un peu vive, cet organe d’au moins une province neutre qualifie ingénument la France et l’Angleterre « nos ennemies ; » l’équivoque, s’il y en eut jamais, s’éclaircit quand on découvre à Aix-la-Chapelle le véritable centre des deux Limbourg.

La presse hollandaise, sans distinction de partis, condamne les menées interventionnistes d’une revue au masque hollandais, De Toekomst, dont le professeur van Hamel a dénoncé, avec preuves photographiques à l’appui, le caractère germanique. Le grand éditeur de La Haye, M.Martin Nijhoff, signale dans le Journal des Libraires le faux commis par l’auteur berlinois de ces Vérités historiques d’après les documens historiques français qu’on essaya de répandre en pays neutres comme une publication de chez nous ; et M. Martin Nijhoff déclare froidement que « cette œuvre de faussaire a été répandue en Hollande par le consulat allemand de Rotterdam. »

Car on ne peut, à La Haye, négliger ce fait que tous les porte-paroles de l’Allemagne en reviennent toujours à l’absorption des Pays-Bas par l’impérialisme voisin. Le geste parfois suit la parole. Dans les colonies néerlandaises, le dessein agressif est bien net. En avril 1916, le gouvernement de La Haye doit intervenir pour sanctionner les agissemens d’un certain Keil, ex-administrateur allemand du Straits Soenda Syndicaat ; ce Keil appelle à l’insurrection les indigènes de Java, leur promet l’éviction prochaine des Hollandais, des armes, des munitions, et d’abord de l’argent pour rallier les Indes au patronage libérateur du Kaiser. La propagande de Keil est heureusement trop peu discrète : cette fois encore, l’indiscrétion germanique dépasse son but.


Entre l’abstention où elle essaye de s’enfermer et l’intervention chaque jour plus positive des belligérans ses voisins, la Hollande voit s’accentuer le contre-coup de la guerre sur son existence nationale. Le jeu des forces économiques du pays est totalement faussé. La paralysie de la vie maritime est la tare la plus visible ; elle bloque au long des canaux les files des chalands,