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Skoumbi, lui assurant toute l’Albanie méridionale. Et elle a eu beau depuis lors, sous la pression des circonstances, renoncer à une partie de ses espérances ; elle n’en a pas moins vu avec quelque déplaisir l’occupation par l’Italie de cette porte de l’Adriatique et du petit îlot de Sasseno, à l’entrée de la rade de Valona, qui lui appartenait depuis 1864 et qu’elle avait, en mai 1914, dû abandonner à l’Albanie. L’occupation de Corfou par les Alliés, malgré son caractère tout provisoire, n’a point diminué ces inquiétudes, et le débarquement dans l’île de quelques élémens de gendarmerie italienne a soulevé à Athènes de violentes protestations. Entre les ambitions albanaises de l’Italie et la zone d’influence à laquelle prétend la Grèce, il y a antinomie évidente ; et les rapports entre Rome et Athènes ont été, en ces derniers mois, plus d’une fois empreints d’une aigre et significative défiance.

Il faut signaler, au moins pour mémoire, les revendications de la Bulgarie qui, dans son âpre désir de prendre dans les Balkans la place de la Serbie, aurait volontiers ajouté aux débouchés qu’elle possède sur la Mer-Noire et la mer Egée une sortie sur l’Adriatique. Le gouvernement bulgare, dans ses déclarations officielles, s’est montré fort réservé sur le sort futur de l’Albanie. Pourtant, et pour les raisons que chacun devine, il ne semble point que ce soit là, dans le problème, un élément d’importance essentielle.


Ainsi, dans la mer Adriatique, entre l’Autriche, l’Italie, la Serbie, — et accessoirement la Grèce et la Bulgarie, — une lutte ardente est engagée pour la prépondérance actuelle et future. Et par là on peut prévoir que, dans les débats de la paix future, la question de l’Adriatique tiendra une grande place.

Comment, entre tant de prétentions contraires, un accord parviendra-t-il à s’établir ? Bien imprudent, à l’heure actuelle, qui le voudrait prophétiser. On peut toutefois tenir pour probable que, dans la dislocation vraisemblable de la monarchie austro-hongroise, le littoral oriental de l’Adriatique échappera à ses maîtres et que, l’Autriche étant ainsi éliminée, une transaction se trouvera nécessairement pour satisfaire l’Italie et la Serbie qui se disputent l’héritage autrichien. D’ores et déjà diverses solutions ont été entrevues. Pour calmer les inquiétudes que donnerait