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REVUES ÉTRANGÈRES

UN LIVRE ANGLAIS
SUR LA « DOCILITÉ » ALLEMANDE


{{c|The Nemesis of Docility, a Study of German Character, par Edmond Holmes, un vol. in-18, Londres, librairie Constable, 1916.


Une chose me paraît certaine : les Allemands n’ont pas de volonté individuelle ; l’initiative, l’autonomie morale sont aussi peu développées chez eux que les sens. Et le trait le plus caractéristique de l’âme allemande est le besoin d’obéir. Peut-être est-ce pour l’avoir trop senti que le grand Frédéric se disait « fatigué de régner sur une nation d’esclaves. »

En aucun autre pays l’esprit de passivité n’est porté aussi loin. Il avait naguère suffi aux journaux berlinois de prêter à la France des intentions belliqueuses pour animer de haine contre nous l’Allemagne tout entière. Pendant six mois, il n’y a pas eu un Allemand qui ne nous détestât ; et puis, après ces six mois, lorsque les journaux ont cessé d’affirmer que la France désirait la guerre, il n’y a pas eu un Allemand qui ne se reprît à nous estimer. Tout se fait ainsi avec un ensemble automatique. On m’a raconté notamment que les progrès du socialisme présentent, en Allemagne, le même caractère d’épidémie. A côté de villages où tous les ouvriers sont socialistes, vous en voyez d’autres voisins où pas un ne l’est. Mais il suffira qu’un seul ouvrier de ces villages se décide, un jour, à devenir socialiste pour que tous ses compagnons d’atelier le deviennent aussitôt.


C’est en ces termes qu’un rédacteur de la Revue essayait de définir, il y a tout juste un quart de siècle, ce que lui-même appelait déjà, dans un autre endroit, la « docilité » allemande [1]. Après quoi il retrouvait des traces non moins manifestes de cette « docilité » dans

  1. La Vie et les Mœurs dans l’Allemagne d’aujourd’hui, dans la Revue du 15 mars 1891.