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une voix (1 092 contre une), « le savant, l’homme d’Etat, le financier, l’émancipateur, le pacificateur, le chef moral de la démocratie, Woodrow Wilson. »

Désormais, il ne reste plus qu’à répondre, dans une déclaration de principes, préliminaire de la campagne électorale de novembre, au programme du parti républicain. Après quelques incidens, malgré l’opposition des timides, effrayés de la vigueur avec laquelle le président Wilson a dénoncé les « citoyens à trait d’union, » la convention affirme, dans ses grandes lignes, les convictions du parti démocrate, d’une manière conforme aux vues de son chef. « Qu’est-ce qu’une convention cherche dans celui qu’elle va présenter au suffrage du pays ? Un homme qui comprenne les conditions de son époque et les exigences de sa nation, qui ait l’autorité et l’initiative de faire accepter ses vues par le peuple et par le Congrès... Parfois, le pays a foi dans un parti, mais, plus souvent, il a foi dans un homme... Les membres de la Chambre et du Sénat sont les représentans de groupes locaux. Il n’y a pas de choix national, si ce n’est du président... C’est la raison pour laquelle le peuple préfère souvent choisir un homme plutôt qu’un parti... Il peut être à la fois le chef de son parti et le chef de la nation. Mais, s’il est le chef de la nation, son parti peut difficilement lui résister. »

Quand, en 1908, Woodrow Wilson, dans des conférences à l’Université Columbia, décrivait ainsi la situation du président des Etats-Unis dans son parti et dans la nation, prévoyait-il qu’un jour la vérification de la justesse de son point de vue se ferait sur sa propre histoire ? Il n’était encore, suivant l’une de ses expressions d’alors, qu’un politique de lettres, « un homme qui, en raison de certaines qualités d’esprit, d’intuition et d’imagination, lit dans la politique comme dans un livre ouvert, mais qui a la sagesse de lire les pages des autres plutôt que d’y glisser son propre caractère. » Maintenant qu’il a perdu cette sagesse de publiciste, pour devenir un homme public, cette philosophie d’un politique de lettres pour devenir un lettré de la politique, le voici qui, vivant ses propres théories, s’impose à son parti par cela seul qu’il est, dans ce parti, le seul homme qui puisse, à l’heure présente, s’imposer au peuple.