Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 37.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pernicieuses. Ainsi, le mal que l’on avait cru enrayer reparaissait, — partiellement, — sous une autre forme. Une fois encore il fallait sauver malgré eux les buveurs d’alcool.

Le 27 juin 1915, parut une ordonnance du Préfet de police : « Il est expressément défendu de boire de l’alcool à brûler et autres produits contenant de l’alcool et n’étant pas destinés à être bus, mais qui sont mis en vente pour d’autres usages ; et aussi d’user des boissons composées avec ces produits.

« Il est également défendu de se procurer par n’importe quel moyen et de conserver chez soi des boissons préparées avec l’alcool à brûler, la laque de vernis, etc. Tout ustensile qui conservera un reste ou une odeur de ces boissons servira à prouver que le détenteur en a préparé.

« Les individus reconnus coupables d’infraction à ces ordonnances seront poursuivis judiciairement et passibles d’un emprisonnement de trois mois de forteresse ou de 3 000 roubles d’amende.

« De même, les individus trouvés dans la rue en état d’ivresse seront punis d’une amende de 100 roubles ou d’un mois de prison. »

Il était temps de sévir. Ce même jour, un nommé Wolkoff était arrêté pour avoir préparé des boissons de cette nature, et la police avait trouvé dans les rues 78 individus en état d’ivresse !


IV. — A L’OUTCHASTOK

Je suis allée rendre visite aux khandjistes dans un des ateliers spécialement installés pour occuper les loisirs forcés que leur donne la prison. C’est là-bas, loin de l’élégante rumeur de la Morskaïa et de la Newsky, dans un quartier populeux, noirci par la fumée des usines et retentissant du bruit des lourds camions qui roulent incessamment sur le pavé. Cela s’appelle : l’outchastok. Chaque quartier a le sien, plus ou moins fréquenté, selon le genre de sa population. Une pluie menue et froide, une vraie pluie de printemps russe ajoute à la tristesse du lieu.

Une vague odeur de goudron flotte dans l’air. Bien que la clientèle du poste ait considérablement diminué depuis la suppression de l’alcool, il ne se passe presque pas de jour où les