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le thé d’abord, dont aucun homme, chez nous, ne peut se passer ; le méod, le koumis, les eaux de fruits, notamment celle qu’on prépare avec une petite baie des marais : la kloukva, et enfin : le kvass. »

Il n’est pas de Français, je pense, qui ait visité la Russie sans goûter au moins une fois à cette boisson domestique. Elle est faite avec du pain que l’on laisse légèrement fermenter. Moins piquante que notre cidre, elle a une saveur très agréable et peut, en été, remplacer avantageusement le thé. Elle contient un infime pourcentage d’alcool, et son innocuité est absolue.

— Pour terminer, reprend le président de la Commission d’abstinence, il nous reste à parler du Journal à bon marché, des Bazars, des Musées et Expositions ambulans. Si chaque paysan de France peut lire son journal avec vingt-quatre heures à peine de retard, il n’en est pas de même en Russie. Le journal arrive lentement, difficilement et il y a des endroits où il ne pénètre jamais. Il faut donc créer des périodiques spéciaux, instructifs, amusans, à la portée des mentalités auxquelles ils s’adressent, et surtout à un prix très modique. Les bazars ambulans permettront au paysan de se pourvoir des principaux objets agricoles dont il a besoin, sans être obligé de faire un long et parfois coûteux déplacement ; la ménagère y trouvera de quoi rendre la maison plus confortable ou plus plaisante.

« Enfin, nous attendons beaucoup des Musées et Expositions ambulans. Un essai a déjà été fait l’année dernière sur la Volga ; et j’espère que d’autres auront lieu cette année.

« Imaginez le pittoresque de cet enseignement : sur la Volga, mère des fleuves, sur le beau Dniester aux larges eaux, un bateau glisse. Longtemps se déroulent les plaines uniformes ; puis, tout à coup, une coupole verte s’arrondit à l’horizon. Au bord du fleuve, près de l’estacade, des paysannes sont rassemblées. Sevrées de distractions, chaque fois qu’un bateau est signalé, elles accourent. Cette fois, il y a sur le bateau une attraction inattendue… La nouvelle se répand vite. On arrive du village, et même de plus loin. Un homme est là, professeur, docteur ou savant, bref un apôtre. Il montre les méfaits de la vodka, les ravages du terrible khandjon, il dit les souffrances et les regrets tardifs de ceux que l’eau de Cologne a rendus aveugles et, aussi, il met en garde contre le rôdeur louche,