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conterai tout cela… Merci de votre message au sujet de la Lusitania. Je m’emploie de mon mieux à venger ce crime et tant d’autres. Mais vous, chérie, ne voyez-vous pas clair en moi, maintenant, et dans les raisons qui m’ont poussé à m’engager ? » Ces fortes, ces impérieuses raisons pour lesquelles un Weeks, avec nombre de ses émules, nous a si généreusement donné sa jeunesse, son talent, ses brillantes espérances de gloire, sa vie, je ne pense pas qu’elles aient été exposées nulle part en termes plus chauds et plus frémissans que dans un éditorial de la New-York Tribune, paru le 27 décembre 1915, sous ce titre français : « Vive la France ! » L’article serait à reproduire en son entier : on m’excusera de n’en citer que des extraits épars. Après avoir pris congé de l’année finissante, « la plus cruelle peut-être qu’ait enregistrée l’histoire du genre humain, et, pour l’Amérique, la plus humiliante assurément qu’ait connue l’amour-propre d’un grand peuple, » le rédacteur, examinant quels vœux il convenait de former au seuil de l’année nouvelle, s’écriait : « Il n’est pas un Américain digne de ce nom qui, parce qu’Américain, ne se sente tenu de souhaiter par-dessus toute chose que les douze prochains mois voient la France délivrée, la Bête boche (the boche Beast) expulsée du plus ultime arpent du territoire français et jusqu’au souvenir de sa trace immonde effacé du sol de la République !… La France que nous avons aimée aux jours anciens a revêtu à nos yeux une signification plus belle et plus haute, depuis que ses hommes, que ses femmes se sont levés d’un mouvement unanime, prêts à sacrifier leurs biens les plus chers, pour garantir à toutes les races humaines le droit de vivre en paix, indéfiniment, et comme elles l’entendront, selon leur idéal, selon leur foi… Nous ne lui ferons pas l’injure de lui dire : Courage ! Plutôt serions-nous tentés de nous voiler la face, nous à qui ce courage a manqué, parce que, dans cette grande heure où l’humanité traverse sa plus rude épreuve, la démocratie américaine s’est lâchement dérobée, pendant que la France, debout, marchait tout entière de l’avant. Ce que nous pouvions individuellement, nous y avons tâché. Maints de nos fils sont tombés dans les rangs français, sur les fronts de Champagne et d’Artois. Des Américains, des Américaines ont donné de leur argent, de leur temps, de leurs forces pour soulager les infortunes et panser les blessures. Si pitoyablement infime que cela