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communes éloignées, les officiers municipaux assistent encore à la messe, en un banc a part qui ressemble fort à l’ancien banc 3u seigneur. D’anciens règlemens subsistent, et çà et là sont remis en vigueur, selon le caprice ou le hasard : c’est ainsi que, dans un village de la Dordogne, en février 1793, un arrêté défend de donner à boire pendant l’office divin. Dans les campagnes, et même en quelques villes, le saint viatique est porté aux malades avec accompagnement de cierges et au son de la clochette. Plusieurs évêques font encore des tournées de confirmation. A l’approche du carême sont publiés, comme aux temps paisibles, les mandemens. Seules à la première page des brochures épiscopales, quelques mentions détonnent. Marbos, évêque de Valence, date son mandement de l’an IV de la liberté et Ier de l’égalité ; cinq autres le datent de l’an I de la République française ; Rigouard, évêque de Fréjus, inscrit sur le premier feuillet cette devise : Vive la nation ! la liberté, l’égalité ou la mort ! Quant à Gouttes, évêque d’Autun, sa lettre aux fidèles porte sur la couverture ces mots : Imprimé chez Brisson, imprimeur de la Société des Sans-Culottes.

On atteint l’été de 1793. La persécution s’affirme, mais entrecoupée de tolérance, presque de faveurs. Le 30 mai 1793, jour de la Fête-Dieu, la procession, en beaucoup de villes, sort encore ; ainsi en est-il à Amiens, à Nantes, à Moulins. — Cependant, tandis que dans les rues flottent les bannières pieuses, la lutte entre Girondins et Montagnards touche à son dénouement. Le 31 mai, le 2 juin, Montagnards et gens de la Commune l’emportent. Parmi les évêques constitutionnels, beaucoup se sentent atteints : tels Saurine, Roux, Expilly, et plus encore Fauchet. Sous prétexte de fédéralisme, un grand nombre de curés, notamment en Normandie, sont destitués. Ailleurs, d’autres prêtres sont dépouillés de leurs fonctions, les uns comme amis secrets des Vendéens, les autres comme suspects de royalisme ou simplement comme indignes de confiance. Cette fois, il semble bien que c’en soit fait de l’Église d’État. Même en cet écrasement du parti modéré, on voit les Conventionnels appliquer encore cette chose caduque qu’on appelle la Constitution civile du clergé. Comme ils procèdent à l’organisation du département de Vaucluse et du département de la Corse, ils décident que les électeurs, en même temps qu’ils choisiront les administrateurs, éliront un évêque pour chacun