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d’un milieu tourmenté par les convulsions révolutionnaires, la sincérité de ses émotions devant les spectacles de la nature la plus grandiose, les renseignemens significatifs rassemblés par elle au jour le jour, le sens anecdotique, l’abondance des traits heureux… C’est surtout que l’auteur s’est trouvé, dans une période critique, au premier plan de son ambassade, c’est-à-dire au centre de la politique américaine au Mexique, et à la meilleure place peut-être pour apprécier cette politique, ses méthodes, son but et ses résultats. Ce sont des « instantanés » impétueusement dictés au chroniqueur par les événemens, qui l’entraînent lui-même dans leur course. C’est la déposition d’un témoin qui n’a pas perdu une minute d’un spectacle tumultueux, qui, mieux que beaucoup, a pu voir les origines, connaître les causes de l’anarchie mexicaine, en prévoir le développement, et dont les souvenirs présentent, pour cette raison, un pouvoir de démonstration exceptionnel. Nous avons ainsi un témoignage de premier ordre sur les événemens obscurs dont le Mexique a été et reste encore malheureusement le théâtre, car on n’ignore pas l’importance des intérêts que possède la France dans ce pays que menacent le pillage et la ruine, à la faveur d’une révolution passée à l’état chronique[1].

Au milieu des roulemens de tonnerre de la guerre européenne, l’attention n’a été que trop naturellement détournée des péripéties de la révolution mexicaine, si pathétiques qu’elles pussent être. On n’a pas oublié, cependant, les événemens retentissans qui avaient brusquement rouvert, en février 1913, la crise que le triomphe de Madéro sur le vieux Porfirio Diaz, et son élection ultérieure en 1911, avaient paru terminer. Rappelons sommairement le pronunciamiento de Félix Diaz, neveu du fameux président, contre le président Madéro, les furieux combats dans les rues de la capitale pendant dix journées tragiques, la prise de possession du pouvoir par Huerta, intervenu comme arbitre entre les deux adversaires, la chute de Madéro et sa mort mystérieuse en compagnie du vice-président, la reconnaissance du nouveau gouvernement de facto par toutes les grandes Puissances, à l’exception des États-Unis, résolus à ne

  1. Il suffira de rappeler que la colonie française de Mexico est, avec celle de Moscou, la plus importante du monde entier, et que le capital français engagé au Mexique atteint trois milliards.