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l’atmosphère terrestre à son altitude Ces lois montrent que les molécules de l’atmosphère étant sollicitées d’une part par la pesanteur qui tend à les amener au sol, d’autre part par leur diffusion, il doit se produire finalement un état d’équilibre moyen qu’exprime précisément la formule vérifiée de Laplace et qui assure la répartition constatée de l’air aux diverses altitudes.

Cette répartition, toutes proportions gardées, serait nécessairement la même ou, du moins, suivrait qualitativement la même loi, si l’atmosphère était composée de molécules beaucoup plus légères ou beaucoup plus lourdes que celles de l’air. Ainsi on calcule que dans une atmosphère d’oxygène la densité baisse de moitié lorsqu’on s’élève de 5 kilomètres ; il faudrait s’élever seize fois plus haut pour obtenir la même raréfaction de moitié dans une atmosphère d’hydrogène, parce que la molécule d’hydrogène est seize fois plus légère que celle d’oxygène.

Mais si — comme l’a conçu M. Jean Perrin, — nous réalisons une sorte d’atmosphère artificielle où les particules seront beaucoup plus grosses et seront par exemple les granules microscopiques (et soumises au mouvement brownien) d’une émulsion, c’est-à-dire d’une solution colloïdale contenant de petites particules en suspension, qu’arrivera-t-il ? On pourra d’abord contrôler que la loi de répartition de Laplace est bien vérifiée et cela en comptant, — lorsque l’équilibre est établi dans la solution, — le nombre des granules visibles dans le champ du microscope à diverses hauteurs. Ensuite il ne restera plus qu’à assurer une dimension à peu près uniforme aux granules et à connaître leur poids moyen (tout ceci n’est pas facile d’ailleurs) et à mesurer, en mouvant le microscope, quel est le déplacement vertical qui correspond à une diminution de moitié de la fréquence des granules, pour avoir, par une simple règle de trois, la valeur de N.

C’est ce qu’a habilement réalisé M. Perrin. Ici, et pour obtenir une diminution de moitié de la densité particulière de son atmosphère en miniature, il ne faut plus s’élever de 5 kilomètres, comme dans l’air, mais de quelques centièmes de millimètres seulement, ce qu’on fait grâce à la vis du microscope.

Par ce procédé et par d’autres concordants et d’ailleurs indépendants et qui utilisent des propriétés différentes du mouvement brownien des particules, on a ainsi obtenu pour le nombre N d’Avogadro des valeurs comprises entre 65 et 69.1022 et qui constituent probablement les déterminations les plus directes et les plus