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des Etats-Unis désignés pour siéger dans les commissions. Le Sénat américain a repoussé les amendements et examiné les réserves formulées à l’égard du traité : nous attendons avec confiance la fin des débats institués en Amérique et où la politique intérieure tient tant de place, et nous pensons qu’ils n’empêcheront pas les États-Unis de ratifier bientôt à leur tour un traité déjà accepté par la plupart de Nations. La paix est faite : il faut l’appliquer.

C’est une nécessité d’autant plus impérieuse que les mois perdus par les Alliés ne semblent pas arranger les questions encore en suspens. La liste des affaires qui restent à régler est encore longue : problème russe, problème turc, problème de l’Adriatique, sort de la Galicie, signature du traité de Saint-Germain par les Yougo-Slaves, conventions particulières avec la Grèce, la Yougo-Slavie, la Roumanie pour la protection des minorités, paix avec la Hongrie. C’est là une tâche encore considérable. Et le temps presse. La conférence n’a pas trouvé le moyen de s’occuper du règlement des affaires turques, et un mouvement nationaliste préoccupant s’est développé en Anatolie : nous avons trop d’intérêts moraux et matériels en Orient pour laisser s’installer un état de désordre qui finirait par menacer la sécurité des populations chrétiennes, et pour ne pas établir le plus tôt possible un contrôle capable de faire respecter tous les droits de l’humanité en même temps que des biens considérables. Surtout les affaires russes demeurent très confusee, et notre politique ne l’est pas moins. Ce n’est plus le général Mangin qui est envoyé dans les provinces baltiques. Le changement de personne peut s’expliquer par bien des raisons, mais les circonstances qui l’environnent paraissent lui donner une signification précise. Le général Mangin, dit-on, aurait jugé que sa mission était inutile, si on ne lui donnait pas tous les moyens de la remplir. S’il en est ainsi, on ne peut que l’approuver. L’envoi d’un délégué, quelle que soit la nation qu’il représente et quel que soit son prestige personnel, est une mesure absolument vaine quand ce délégué n’est pas mis matériellement à même d’obtenir ce qu’il demande. S’il ne s’agit que de faire une démonstration d’apparence, on comprend que le général Mangin ne s’en soit pas soucié, mais on comprend moins que le gouvernement le lui ait préposé. Tant que les Alliés ne se seront pas mis d’accord sur ce qu’ils veulent ou sur ce qu’ils peuvent accomplir en Russie, ils feront mieux de s’abstenir de toute démarche improvisée et de ne pas annoncer des décisions incertaines ou des départs de com-