Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/944

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
940
REVUE DES DEUX MONDES.

lumière d’un élément donné, par exemple les deux raies jaunes, caractéristiques du sodium, qu’on trouve dans la flamme d’un bec Bunsen, doivent être déplacées, et même dans certains cas dédoublées ou détriplées lorsqu’on place cette flamme entre les pôles d’un électro-aimant.

Or, toutes ces prévisions théoriques ont été expérimentalement vérifiées, — à quelques détails près sur lesquels ce n’est pas le lieu d’insister, — au cours d’expériences admirables réalisées par le physicien Zeeman. Cette concordance entre les faits et les vues théoriques les plus audacieuses à la fois et les plus précises a apporté une base solide et nouvelle aux hypothèses d’où découlaient ces vues théoriques, et en particulier à la conception de plus en plus évidente d’après laquelle les atomes sont réellement formés de petites particules gravitant à de folles vitesses et chargées d’électricité.

Le phénomène découvert par Zeeman, le phénomène de Zeeman, comme on l’appelle partout maintenant, c’est-à-dire le déplacement et la subdivision des raies spectrales des corps sous l’action d’un champ magnétique, a d’ailleurs eu d’innombrables autres conséquences. Notamment, ainsi que je l’ai exposé ici même en 1914, il a permis de déterminer et de calculer exactement le champ magnétique général du soleil et celui que forment les tourbillons électrisés des taches solaires.

Mais si nous revenons à la constitution des atomes, il nous reste à montrer que, sur un point d’extrême importance, le phénomène de Zeeman a apporté des clartés définitives et imprévues, et de toutes parts confirmées depuis par d’autres méthodes :

Tout d’abord, on a déduit du sens dans lequel les raies spectrales des éléments chimiques sont déviées et dédoublées, et des propriétés particulières de ces raies, que les corpuscules auxquels sont dues les radiations produites sont chargés d’électricité négative, pour la grande majorité au moins.

Ensuite, en comparant et en mesurant, avec des appareils de précision, la quantité dont sont déplacées les raies des éléments chimiques les plus divers dans un même champ magnétique, on en a déduit que la charge électrique du corpuscule vibrant, ou plutôt sa masse, ou plus exactement encore, le rapport de ces deux quantités a toujours la même valeur quel que soit l’élément chimique considéré. Par conséquent, les petits corpuscules chargés d’électricité négative et qui, dans tous les éléments examinés, produisent par leurs vibrations les radiations lumineuses sont toujours identiques entre eux. Ces