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l’opérateur se déduira immédiatement de la différence des distances qui sur ces clichés séparent les deux images du clocher d’un point de repère donné. Pour prendre un autre exemple familier, il en est de même lorsqu’on chemin de fer on observe par la portière les poteaux télégraphiques ou les arbres : ceux-ci paraissent se déplacer par rapport à l’horizon éloigné qui reste à peu près immobile. Leur déplacement par rapport à lui est d’autant plus grand que les arbres sont plus près du train, et il est clair qu’en mesurant la valeur de déplacement entre deux bornes kilométriques successives franchies par le train, un voyageur curieux pourrait reconnaître assez exactement les distances qui le séparent des objets qu’il voit défiler devant lui. Remplacez l’œil de notre voyageur par une lunette photographique, l’arbre voisin par une étoile dont on veut mesurer la distance, les points de repère immobiles de l’horizon éloigné par les images des étoiles les plus éloignées, c’est-à-dire en général les moins brillantes, ou plus exactement par la position moyenne apparente sur le cliché de toutes les étoiles faibles ; remplacez encore les deux bornes kilométriques successives par les positions de la terre à six mois d’intervalle de part et d’autre du soleil ; remplacez enfin… ou plutôt d’abord, car c’est la condition primordiale, le wagon par notre terre elle-même emportée à 24 kilomètres à la seconde dans sa course ronde autour du soleil, et vous comprendrez comment on mesure maintenant par la photographie les distances de beaucoup d’étoiles.

Par ces méthodes on a mesuré assez exactement les distances des étoiles dont la parallaxe n’est pas inférieure à un vingtième de seconde d’arc, c’est-à-dire dont la distance ne dépasse pas vingt parsecs, c’est-à-dire n’est pas de plus de quatre millions de fois celle qui nous sépare du soleil. Mais la plupart des étoiles sont beaucoup plus loin encore et il a fallu trouver d’autres méthodes pour mesurer leur éloignement.

Tout d’abord on a eu l’idée ingénieuse et féconde d’employer comme base pour la triangulation, non pas le diamètre de l’orbile terrestre qui, avec ses 300 millions de kilomètres, n’est qu’une bien petite chose dans l’espace, mais la distance constamment croissante qui est due au mouvement de tout le système solaire à travers l’espace. Déjà le grand Herschel avait remarqué à propos des petits mouvements propres des étoiles, c’est-à-dire des petits déplacements de leurs positions relatives qu’on observe d’une année à l’autre, que ces mouvements apparents pouvaient être dus en partie à un déplacement du soleil et de son cortège de planètes.