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été dépensés, et une dizaine de milliards hors budget doivent y être ajoutés : c’est 200 milliards qui ont été effectivement payés en cinq ans et demi. Pour suffire à ces dépenses, il fallait d’autres ressources que les recettes régulières. Si on avait voulu recourir à l’impôt, il aurait fallu en créer de considérables, et les gouvernements ont jugé qu’ils devaient attendre pour en accroître le poids que le pays fût délivré de l’invasion et pût reprendre son activité économique. Malgré l’énorme proportion des mobilisés en France, qui a atteint 89 pour 100 de la population masculine, les Chambres ont demandé aux contribuables en pleine guerre trois milliards de ressources nouvelles. Mais c’est surtout à l’emprunt que l’État a eu recours, sous des formes diverses : bons du Trésor, bons et obligations de la défense nationale ; emprunts à court terme à l’étranger ; grands emprunts en rentes consolidées ; avances de la Banque de France. Notre dette est par suite énorme. Sans parler des 15 milliards dus aux États-Unis et des 12 dus à l’Angleterre, notre dette flottante nationale atteint 50 à 60 milliards. Le premier acte de toute politique financière est de la consolider, afin de rembourser les avances faites par la Banque de France, de réduire la circulation fiducière, d’améliorer notre change, d’arrêter dans quelque mesure la hausse générale des prix, d’assainir en un mot notre situation. L’emprunt voté par les Chambres doit servir à cet objet. Mais un emprunt unique ne suffira pas. Les capitaux pour se formeront besoin de temps ; c’est par étapes qu’il faudra procéder, et il est nécessaire de prévoir des emprunts successifs. Ils seront d’autant plus utiles que nous devrons alimenter longtemps des budgets extraordinaires destinés à liquider les charges de guerre, à réparer les dommages et à exécuter de grands travaux.

Quant au budget ordinaire, nous ne le connaissons pas encore en détail, mais nous savons qu’il montera à 16 ou 17 milliards. Avant la guerre, il était de 5 milliards. Les dépenses civiles et militaires, par suite des nécessités de la guerre, du relèvement des traitements et de quelques autres causes, réclameront environ 7 milliards, et 10 milliards seront nécessaires pour les intérêts de la dette. Les impôts actuels fournissent une dizaine de milliards : c’est donc 7 milliards d’impôts nouveaux qu’il faudra créer. Ils seront demandés à la fois aux impôts indirects qui, modérément maniés, ont fait preuve de beaucoup d’élasticité et aux impôts directs. La matière en ce qui concerne les impôts directs est particulièrement difficile par suite des lois nouvelles de l’impôt sur le revenu global et