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traits par l’Allemagne au juste châtiment de leurs forfaits, les Alliés exerceront leur droit devant leurs propres tribunaux. Dès maintenant, ils se proposent de faire rassembler par une commission interalliée toutes les charges relevées contre chacun des coupables : ce travail ne sera pas seulement communiqué à l’Allemagne, il sera publié, et les Alliés feront bien de le faire connaître à tout le monde civilisé. En ce qui concerne l’extradition de Guillaume II, les Alliés ont également adopté une solution moyenne. Ils ont envoyé à la Hollande une note pressante où ils expriment leur surprise de ce que le gouvernement des Pays-Bas n’a pas trouvé un seul mot de réprobation pour les crimes commis par l’empereur, auteur responsable de la guerre, et de ce qu’il ne paraît pas comprendre l’importance d’une question qui touche toutes les nations. Ils réclament de la Hollande qu’elle mette Guillaume II hors d’état de nuire en l’éloignant de la frontière allemande où il reste le centre d’intrigues continuelles et où il constitue une menace pour la sécurité de l’Europe. Ils insistent pour que la Hollande, si elle ne se décide pas à livrer l’empereur comme elle devrait le faire, prenne au moins la précaution de l’interner dans une région lointaine. Dans les deux cas, aussi bien pour la livraison des coupables que pour l’extradition de l’empereur, les Alliés ont essayé à la fois de maintenir leurs droits et de se montrer modérés dans l’exécution des mesures qu’ils réclament. L’avenir dira si l’opinion allemande saisit cette nuance, et si elle ne prend pas prétexte des notes qui ont été envoyées pour avoir de nouvelles exigences. En réalité, les Alliés paraissent vouloir porter leur effort sur d’autres articles du traité. Les clauses contenues dans les articles 227 et 228, relatifs à la punition des crimes allemands, auraient été plus faciles à faire exécuter au lendemain même de la victoire, et au moment de l’armistice. Les atermoiements de la Conférence, là comme ailleurs, n’ont pas été heureux. Au bout de quinze mois, il est plus malaisé d’obtenir même matériellement ce qui aurait été possible sous le coup de la défaite. Les Alliés ont préféré manifester toute leur énergie à l’occasion de réclamations qu’ils jugeaient plus importantes pour l’avenir.

Ce n’est pas les sujets de se plaindre qui leur manquent. La mauvaise volonté allemande, si aisée à deviner et si peu cachée depuis un mois, est aujourd’hui bien manifeste. Qu’il s’agisse de la livraison du charbon, des réparations, des effectifs ou de la fabrication du matériel de guerre, la tactique allemande est toujours la même : esquiver les promesses contenues dans le traité, se déclarer incapable de