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comment finit la guerre.

camp retranché ne disposera plus que d’un petit chemin de fer à voie d’un mètre, le « Meusien, » tandis que sur le front allemand qui lui fait face viennent aboutir quatorze voies normales : les transports de troupes, de vivres et surtout de munitions sont donc tout en faveur de l’attaque, qui en outre aura pu préparer ses ravitaillements à l’avance, tandis que la défense devra tout improviser.

Les industriels allemands ont attiré l’attention du Haut Commandement sur la nécessité d’annexer le bassin de Briey, dont les mines de fer complètent si bien les houillères de Sarrebruck et si, par épuisement des deux partis, les négociations s’engagent sur les positions de combat, sans qu’une action décisive ait culbuté l’un des deux adversaires, on tiendra forcément compte de ces positions et il y a grand intérêt à gagner du terrain autour des mines convoitées. Enfin Verdun, pris par les Prussiens en 1792 et en 1870, est l’un des trois évêchés (Metz-Toul-Verdun) donnés à la France par Henri II au XVIe siècle et où fut signé le traité de 843 qui a partagé l’Empire de Charlemagne entre ses trois petits-fils : cité gauloise, oppidum romain, citadelle du Roi Très Chrétien, camp retranché de la République Française, Verdun a toujours exercé une fascination singulière sur les imaginations germaniques, et sa prise, qui apparaissait comme relativement facile, pouvait être célébrée en elle-même comme une grande victoire en Allemagne et dans tous les pays neutres. Telles sont les raisons qui ont motivé le choix de l’attaque allemande et ont fait écarter des objectifs plus rapprochés de Paris et capables de procurer des avantages stratégiques plus importants.

L’attention particulière du Commandement et même du Gouvernement français avait été attirée sur Verdun.

À la suite de la prise de Liège, de Namur, d’Anvers et de Maubeuge et de plusieurs forts d’arrêt en France, l’importance de la fortification permanente, — même la plus moderne, — avait semblé bien diminuée. On pensait que les obusiers de gros calibres avaient la puissance de détruire ou de rendre intenable en quelques heures l’ouvrage le mieux organisé, et que, par conséquent, les camps retranchés devaient se transformer complètement, si on voulait leur permettre de jouer leur rôle protecteur ; il fallait en reporter la défense très en avant des anciens ouvrages et empêcher l’ennemi d’entre-