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dans son remarquable rapport général, que chaque jour passé depuis le 1er janvier représentait vingt-quatre millions de recettes perdues et qu’ainsi chaque heure de discours coûtait un million au budget. Mais la Commission, un peu plus exigeante que le gouvernement lui-même, demandait à la Chambre de voter huit milliards cinq cent millions d’impôts nouveaux, et il était fatal que des mesures aussi graves ne pussent être adoptées yeux fermés et bouches closes.

M. Charles Dumont en sera donc malheureusement réduit à défalquer de ses prévisions de recettes un nombre assez considérable d’heures de discours, sans compter les impôts tombés en route. Ce ne sera que demi-mal, si, comme il n’en faut pas douter, le but final est atteint. M. Charles Dumont a eu raison de faire, au nom de la Commission des finances, cette déclaration préliminaire : « Tant que nous n’aurons pas rétabli l’équilibre entre nos recettes normales et nos dépenses permanentes, nous n’aurons pas fait ce que le traité de paix nous impose comme une nécessité, ce que nos alliés et associés, bons conseillers et créanciers attentifs, considèrent pour nous comme un devoir. » Lui aussi, à la tribune du Sénat, M. Antonin Dubost a envisagé la situation budgétaire dans ses rapports avec les pays alliés et associés et il a repris avec force une thèse qui lui est chère, qu’il n’a cessé de défendre depuis l’armistice et qu’il a même exposée directement à M. Wilson, le jour où le Président des États-Unis a été reçu au Luxembourg. Il a exprimé le regret que nous n’eussions pas, dès la première heure, dans la préparation du traité, stipulé les conditions essentielles d’une vaste solidarité financière, qui eût été, à ses yeux, la vraie consécration de la victoire et la meilleure garantie de notre relèvement rapide. Il est malheureusement certain que, depuis plus d’un an, et dans les deux mondes, le temps a travaillé contre nous. Des ardeurs se sont refroidies, des souvenirs se sont effacés, des liens se sont insensiblement relâchés. Raison de plus pour qu’aujourd’hui nous sachions donner à tous ceux qui ont combattu auprès de nous et pour la même cause l’impression très nette que nos vertus civiques ne sont pas inférieures à nos vertus militaires; et les vertus civiques les plus indispensables à notre crédit extérieur sont la frugalité, l’économie, l’activité et la contribution volontaire aux charges nationales. Comme le remarquait très justement M. Aristide Briand, les Alliés s’étaient promis, en 1916, de mettre en commun toutes leurs ressources en hommes et en argent. Le jour où nos amis verront que nous supportons les sacrifices d’aujourd’hui avec autant d’abnégation que ceux d’hier, ils reviendront,