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toire. Porté à Reims, chassé de Reims, revenu à Reims, il y passait les dernières semaines de 1914, s’en évadant sans cesse pour ces excursions aux tranchées, du goût de celle dont il a publié, en 1910, le récit piquant, cette « Nuit de Noël » où l’on gagna à coups de fusils le droit de manger la dinde apportée par le bon camarade, associé tour à tour aux deux fêtes.

Il était depuis quatorze mois à l’État-major de la 1re armée et, j’en suis témoin, s’enrageait d’une longue stagnation, quand, le 22 février, le trommelfeuer éclatait sur le front de l’armée voisine, l’armée de Verdun. Il obtint d’y courir « en liaison pour un jour » et allait y rester, à un tout autre titre, pendant près de dix mois.


Depuis les premiers mois de guerre fonctionnait au Grand Quartier général, non sans quelques difficultés, une Section d’information. Sous ce titre un peu énigmatique, un tout petit groupe d’officiers, — bien particuliers, — travaillait à faire valoir notre effort de guerre, fournissant aux attachés militaires à l’étranger et parfois à la presse les informations nécessaires pour que la gloire récoltée ne restât point ignorée. J’espère que l’un de nous aura, quelque jour, le loisir d’écrire l’histoire de cette curieuse et précieuse Section et on saura alors au prix de quelles opiniâtres instances quelques hommes de lettres arrachèrent à l’armée licence de faire connaître ses incomparables exploits. Longtemps M. André Tardieu avait, à lui tout seul, constitué cette section. Après son départ, deux de nos brillants confrères, MM. Maurice Pernot et Jean de Pierrefeu, étaient, à grand’peine, parvenus à sauver l’institution généralement méconnue et, aidés de M. Fernand de Brinon, à en prouver l’utilité par un zèle que rien ne décourageait. Ainsi avaient-ils non seulement maintenu cet embryon de propagande, mais l’avaient-ils développé en faisant désigner dans quelques armées des officiers, — publicistes et écrivains, — qui, qualifiés « officiers d’information, » alimenteraient le travail de la section. Je crois bien que le premier désigné fut notre confrère M. François de Tessan : Henry Bordeaux cumulait, à la 1ère armée, avec ses fonctions d’État-major, celles d’ « officier d’information » qui, lorsqu’il n’y avait point bataille, ne consistaient guère qu’à faire éclater la patiente vertu du poilu dans la tranchée.