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comment finit la guerre.

de cette réserve, il restera le point faible, celui que l’ennemi devait attaquer, et qu’il attaqua.

Ludendorff nous apprend en effet qu’il examina trois projets d’offensive, le premier dans les Flandres, qu’il écarta parce que l’état du sol y nécessitait l’attente de l’été. Le second vers Verdun, en négligeant la place et en attaquant des deux côtés ; mais le terrain était très escarpé, et le succès ne pouvait avoir qu’une importance locale. Au contraire dans le troisième projet, l’attaque sur le front Arras-St-Quentin-La Fère ne rencontrait devant elle que des organisations récemment établies et encore inachevées et une densité de troupes relativement faible, car l’armée britannique du général Gough venait d’étendre son front, sans que ses effectifs fussent renforcés. La percée une fois obtenue, le centre de l’attaque se reportait entre Amiens et Péronne, vers la côte ; « le succès stratégique pouvait être énorme, dit Ludendorff, car nous coupions de l’armée française le gros des forces anglaises en les poussant à la côte. »

Deux nouvelles armées allemandes apparaissaient sur le front : celle du général von Below avec l’État-major qu’il ramenait d’Italie après Caporetto ; l’autre, entre Saint-Quentin et La Fère, avec le général von Hutier, qui avait commandé l’offensive contre Riga. Ludendorff nous fait remarquer le soin qu’il a pris de répartir le front d’attaque entre deux commandants de groupes d’armées, celui du kronprinz allemand et celui du kronprinz de Bavière. » Je tenais, dit-il, à exercer la plus grande influence sur la bataille, ce qui était délicat quand elle était dirigée par un seul groupe d’armées. »

La concentration des cinquante divisions d’attaque s’effectua en sept jours, surtout par des marches de nuit. La préparation de l’artillerie, au lieu de prendre six, huit et même dix jours, comme dans les attaques françaises et anglaises, se réduisit à quelques heures ; un large emploi de gaz toxiques neutralisait les batteries, et enfermait les hommes dans leurs abris. L’infanterie s’avance sous la protection d’un barrage roulant, dont la marche détermine l’allure de la bataille. « Cette vitesse était à régler d’avance, dit Ludendorff. Car, malgré toutes les expériences et tous les calculs, la science tactique et technique n’avait pis fourni le moyen de donner pratiquement au tir un rythme conforme au développement de la bataille. » En adoptant les procédés employés par les armées française et