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étroite entre les armées britannique et française, notamment par la possession, puis par la libre disposition d’Amiens. » Mais il avait déjà écrit, le 27, au général Pétain : « Il n’y a plus un mètre du sol de France à perdre. » Sur tout le front, l’ordre était : Tenir à tout prix, là où l’on est ; s’organiser solidement en se reconstituant des réserves à l’arrière.

Après les violentes attaques du 29 et du 30, le front se fixa. Les derniers soubresauts se produisirent le 4 avril. « Ces combats restèrent sans résultat, dit Ludendorff. La résistance ennemie s’affirmait supérieure à notre capacité offensive. On ne pouvait entamer une bataille d’usure ; notre situation stratégique, pas plus que notre situation tactique, ne le permettait. Le commandement suprême se vit donc contraint, d’accord avec les états-majors compétents, à prendre une résolution véritablement pénible. On arrêta définitivement l’attaque sur Amiens. »

Ludendorff fait son bilan : 90 000 prisonniers, une éclatante victoire sur les Anglo-Français, obtenue dans la quatrième année de guerre, par la réussite d’une entreprise que ses ennemis ont plusieurs fois essayée sans succès ; mais enfin, le but essentiel de cette entreprise est manqué, puisque Amiens n’est pas pris. En outre, la situation est délicate, au fond d’une poche profonde, où les ravitaillements sont difficiles, et nuls les abris pour les troupes au repos. Tactiquement, il faudrait évacuer la rive gauche de l’Avre, mais on ne peut renoncer à la menace contre Amiens. L’avance des 23, 24, 25 mars n’a pas été celle que l’on attendait : la XVIIe armée s’est montrée inférieure ; la discipline a faibli et les troupes se débandent sans cesse pour piller les dépôts de vivres abandonnés par les Anglais, d’où la lenteur de la progression. Les pertes sont assez considérables, surtout à la XVIIe armée. « Les installations de secours pour les blessés n’avaient pas partout été suffisantes ; pourtant le chef de l’organisation sanitaire de campagne les avait inspectées en détail avant la bataille. Les blessés légers, en grand nombre, rendaient les soins difficiles par leur hâte, irraisonnée et attristante, d’aller à l’arrière. » Mais on retrouvera assez rapidement ces blessés-là. Les nids de mitrailleuses ont beaucoup retardé l’avance ; il faudra reprendre l’instruction en se servant de l’expérience acquise au cours des derniers combats ; obtenir une meilleure liaison entre l’artillerie et l’infanterie ; apprendre les