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comment finit la guerre.

qui représentent un nombre au moins double de tués et de blessés, 6 217 canons, 38 622 mitrailleuses et un matériel immense. C’est l’effondrement certain, inévitable ; et la retraite est impossible ; entre la pointe méridionale de la Hollande et la Sarre, nul moyen de mettre en mouvement tout cet énorme ensemble. Même après l’armistice et en laissant sur place tout son matériel, le commandement allemand y renonça et dut traverser le Limbourg hollandais.

L’attaque de Lorraine était fixée au 14 novembre. Mais, le 11, l’armistice était signé : par une capitulation en rase campagne, les armées allemandes échappaient au désastre.


Les événements expliquent clairement la demande d’armistice faite par l’Allemagne. Le front se lézarde de tous côtés et est près de s’effondrer. En septembre, un vaste repli était possible, au prix de pertes énormes en matériel, mais il eût permis d’essayer une reconstitution des armées allemandes. En offrant alors aux Alliés des conditions acceptables, le Kaiser eût pu sans doute entamer des négociations sous le couvert d’une force encore redoutable. Mais la lutte a continué, le contact étroit est pris partout, et partout les armées de l’Entente avancent avec une ardeur qu’accroît sans cesse leur succès. Et à ce moment, sur un front jusqu’alors tranquille, surgit une attaque dont l’action va inévitablement provoquer une catastrophe sans précédent dans l’histoire. La vue seule du champ de bataille indique que les armées allemandes ne peuvent plus que déposer les armes et s’en remettre, sans discussion, aux conditions qu’il plaira au vainqueur de leur imposer.

Comment l’Allemagne s’est-elle laissée acculer à une telle situation ?

Ludendorff a bien préparé son offensive du 21 mars ; le front d’attaque était judicieusement choisi. Du 24 au 27 mars, un corps de cavalerie soutenu par des auto-canons, des mitrailleuses et des bataillons en camions-autos avait les routes libres et aurait pu obtenir d’abord un vaste élargissement de la brèche, puis une avance beaucoup plus profonde. La bataille aurait continué son cours dans des conditions toutes différentes et il est probable que le premier objectif, la séparation des armées anglaises d’avec les françaises, aurait été atteint.