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ment pourraient-ils penser, par une simple défensive, « imposer leur volonté » à un ennemi qui peut aligner de telles ressources, sans cesse croissantes, alors que la pénurie de leurs effectifs les a obligés à dissoudre 22 divisions ? Que leur amour-propre personnel et que leur orgueil national répugnent à reconnaître qu’ils ont trouvé leur maître dans le maréchal Foch, on le conçoit ; mais ils pourraient s’incliner devant ces chiffres et devant les premiers résultats de l’offensive alliée. Ils sentent parfaitement que le moment est venu de déposer les armes : puisque l’Allemagne ne peut plus gagner la guerre, et qu’ils ont devant eux un adversaire qui attaque, — et comment ! — ils sont forcément battus et leur devoir serait de le faire comprendre à leur souverain, dont au contraire ils prolongent l’aveuglement.

Et que fait ce souverain, dont le seul remède à la situation consiste dans une propagande intense menée par MM. Ballin, Heckscher, etc. sous la direction occulte du ministère des Affaires étrangères ? À défaut du génie de Frédéric II, il pourrait avoir hérité un peu de sa constance dans les revers et de sa faculté de décision. Il reste inerte, cédant toujours trop tard à la pression des événements, qu’il s’agisse de concessions à ses ennemis ou aux partis avancés. Pour relever le moral de l’Allemagne, son chancelier von Hertling se propose de faire pression sur les jugés du prince Lichnowsky en leur donnant connaissance des effets déplorables que ses révélations ont produits sur le front, et de poursuivre la réforme du droit de vote en Prusse. — Quant au secrétaire d’État aux Affaires étrangères von Hintze, il a demandé, dit-il, à commencer l’action diplomatique, mais sans dire sur quelles bases, et le maintien des buts de guerre fixés pour le cas de la victoire empêchait évidemment toute espèce de pourparlers. — En somme, aucune décision ne sortait de cette conférence solennelle, la dernière à laquelle le Kaiser assista.

Pourtant l’Autriche insiste pour une démarche immédiate auprès de toutes les Puissances belligérantes ; le gouvernement allemand veut attendre que les armées allemandes aient terminé leur repli et s’adresser alors à une Puissance neutre qui servira d’intermédiaire. Mais le repli se prolonge sans fin et la situation s’aggrave. L’empereur Charles, qui a reçu le 3 septembre la même réponse que le 15 août à sa proposition de pourparlers, demande où le commandement allemand a l’intention de résister et à