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taient en France, où une partie des contingents européens de l’Algérie les rejoignait. C’était une augmentation sensible de nos forces disponibles dès le premier jour de la mobilisation, et des ressources considérables qui se préparaient pour la suite des opérations éventuelles. L’organisation des troupes noires eût donc vu se terminer en 1914 le premier stade de son organisation.

Mais, s’il est possible en France de lancer une idée, il est beaucoup plus difficile d’en poursuivre la réalisation quand elle s’échelonne sur plusieurs exercices budgétaires, surtout quand la force d’inertie des pouvoirs publics entre en jeu. Un second bataillon alla rejoindre le premier en Algérie en 1912, puis on en resta là, malgré la bonne volonté du gouverneur général Merlaud-Ponty, qui offrait « tous les tirailleurs qui seraient demandés. »

Toutefois, malgré beaucoup de mauvaises volontés, douze bataillons sénégalais faisaient campagne au Maroc, où M. Millerand en avait activé l’emploi pendant son premier passage au ministère de la Guerre.

En 1914-1915, grâce au gouverneur général Ponty, 34 000 tirailleurs furent levés. Mais, après sa mort, ce recrutement fut arrêté et ne reprit que grâce à l’initiative parlementaire qui dut faire pression sur le gouvernement. 50 000 hommes, — chiffre fixé par les commissions de l’armée à la Chambre et au Sénat, — furent levés en 1916 ; puis le recrutement tomba de nouveau. On lui imputa faussement des troubles dont étaient responsables quelques administrateurs, qui furent condamnés plus tard par la cour d’assises. Mais le prétexte était commode et servit deux ans. Il fallut que M. Clemenceau imposât sa volonté et envoyât la mission Diagne dans l’Ouest africain. Le résultat fut un contingent de 77 000 hommes, dont 63 000 pour l’Afrique occidentale et 14 000 pour l’Afrique équatoriale. Au total, l’Ouest africain nous fournit, au cours de la guerre, 181 500 tirailleurs, dont 134 000 débarquèrent en Europe ou en Algérie. Le reste fit campagne au Cameroun ou au Maroc et maintint l’ordre dans un ensemble de colonies plus vaste que l’Europe.

Madagascar n’a que 3 millions d’habitants, mais cette colonie avait comme gouverneur général le lieutenant-colonel Garbit, qui « entra dans la guerre » sans hésitation. Aussi Madagascar donna 41 000 hommes et 5 000 travailleurs de 1914 à 1917. Mais le lieutenant-colonel Garbit, ayant demandé à combattre sur le