Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/145

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

négligée, peignoir sans ordre et cheveux en brouillamini, toute la journée, dans la maison. La distinction de Hugues s’en offensait. Pourtant il allait toujours chez elle, cherchant à ressaisir le mirage qui échappait. Lentes heures ! Soirées maussades ! Il avait besoin de cette voix. Il en buvait encore le flot foncé. Et en même temps il souffrait des paroles dites.



Jane, de son côté, se lassait de ses humeurs noires, de ses longs silences. Maintenant, quand il arrivait, vers le soir, elle n’était pas revenue, attardée à des flâneries en ville, des achats dans les magasins, des essayages de robes. Il venait aussi la voir à d’autres heures, en plein jour, le matin ou dans l’après-midi. Souvent elle était sortie, n’aimant plus à rester chez elle, s’ennuyant du logis, toujours en courses par les rues. Où allait-elle ? Hugues ne lui connaissait aucune amie. Il l’attendait ; il n’aimait pas à rester seul, il préférait se promener aux environs jusqu’à son retour. Inquiet,